dimanche 25 septembre 2011

À moins d'un miracle? Yeah right...

11 au 16 mars

Lemleck est entré et sorti de sa cabine à quelques reprises pour prendre des affaires sans jamais s’occuper de moi. J’ai fini par me lasser et je me suis placée entre lui et la porte, bien décidée à obtenir des réponses. Je lui ai carrément demandé : qu’avait-il trouvé dans mon sac qui lui avait fait se dire que je pourrais lui être utile à je ne sais pas quoi? En retour, il m’a demandé mon nom de famille. Euh…Quand je lui révélerais, il me dirait ce qu’il voulait faire de moi.

Ok… Alors il sait que je suis noble… Je ne devrais pas m’étonner que la belle-sœur lui ait donné des infos sur moi, mais plutôt de quel genre d’infos elle lui a donné. Et en quoi le fait que je sois noble pourrait bien l’aider?

La cabine du capitaine était bien confortable, mais je n’avais pas trop envie de m’y attarder. J’étais certaine que le capitaine soûl finirait par revenir et me kicker hors de là, alors j’ai décidé de prendre les devants. Je suis retournée dans ma cabine et tant pis si ça ne lui plaisait pas.

J’ai trouvé ma cabine légèrement en bordel, la décoration maintenant agrémentée de nombreuses bouteilles d’alcool. Je n’avais pas envie de me taper le nettoyage de tout ça alors j’ai pris ce qui m’appartenait et je suis retournée dans la cabine du capitaine.

Je me sentais très seule, mais au moins j’avais Link. Il venait parfois me porter à manger et je pouvais discuter avec lui. Quand je lui ai dit que le sac à dos n’était pas vraiment à moi, il m’a suggéré de ne pas en parler au capitaine. Si jamais il se rendait compte que je ne lui étais plus utile… Mon état de fille avait beau me procurer une certaine immunité contre mon état d’elfe, je ne tenais pas particulièrement à me retrouver par-dessus bord.

J’ai aussi eu plusieurs visites discrètes de marins, qui venaient me porter en douce des vêtements à réparer. Ça ne comblait pas ma solitude, mais au moins ça me tenait occupée.

16 au 30 mars

Link m’a aussi emmenée prendre des marches sur le pont. Je ne sais pas si l’air m’a été bénéfique, mais ça m’a tout de même permis de voir autre chose que les quatre mêmes murs. Fait tout à fait surprenant, le capitaine n’était jamais là quand je sortais. Je me demande vraiment pourquoi il m’a sauvé la vie puisque même le fait de partager le même air que moi lui est pénible. Il me déteste plus que je ne le pensais ou alors il me blâme vraiment pour ce qui s’est passé…

Nous sommes finalement arrivés à un port. Les marins étaient armés jusqu’aux dents en débarquant de la marchandise. C’est fou comme je me sens rassurée…

Lemleck m’a ordonnée de prendre mes affaires parce que nous débarquions. J’ai presqu’eu envie de pleurer en rassemblant mes maigres possessions : un sac à dos, quelques vêtements, des trucs à broder, des livres et le violon que Lemleck m’avait trouvé. J’avais tellement perdu depuis un an et pourtant, je finissais toujours par me racheter des affaires ou par accepter des cadeaux auxquels je m’attachais. Je devrais arrêter. Ça me démolissait un peu plus à chaque fois.

30 mars au 1er avril

J’ai embarqué à la suite de Lemleck dans un carrosse. Il ne m’a pas kickée dehors alors je suppose que c’était là qu’il voulait que j’aille.

Nous avons voyagé pendant deux jours au cours desquels Lemleck m’a royalement ignorée, à part la fois où il a été tellement soûl qu’il m’a proposé de l’alcool. J’ai aussi eu droit à une redingote jetée (j’insiste ici sur le jetée) sur moi en guise de couverture pendant que je dormais.

Nous sommes arrivés à un manoir le 31 mars au soir. Lemleck a débarqué du carrosse sans m’accorder un regard. Je me suis dit que je devais le suivre, mais le temps que j’arrive à l’intérieur, je l’avais perdu de vue. Je préférais ne pas m’aventurer, alors je suis restée dans le hall d’entrée. Quelqu’un finirait bien par venir me chercher.

La première personne qui m’a aperçue s’est sauvée en courant. Une autre a pleuré. Une autre a crié. Ça a été comme ça à chaque fois. Les serviteurs me regardaient comme si j’étais un monstre et se sauvaient ensuite, à différents degrés de panique. Pas une seule fois, je n’ai pu demander des explications. Ben là… Qu’est-ce que j’ai fait? Muuu… Complètement dépitée, je me suis assise sur un banc et je suis restée là jusqu’au lendemain matin, jusqu’à ce que Link vienne encore à ma rescousse.

Je devais avoir l’air d’une pauvre âme en peine quand il m’a vue. Je pense que j’aurais presque préféré ne pas lui parler, parce que ce qu’il m’a dit m’a complètement découragée. Ça ne servait rien à rien que j’essaie de m’enfuir, parce que passé dix kilomètres, je risquais de me faire attaquer.

Le seul moyen qui me permettrait de partir serait qu’un miracle se produise : que je convaincs Lemleck. Je me suis mise à rire. Je ne partirai jamais d’ici alors. Link m’a dit que j’avais besoin d’alliés et que lui ne pouvait pas m’aider ici. Mais ils me détestent tous… Il m’a rappelé qu’il n’y a pas si longtemps, c’était moi qui détestais les pirates. Alors il faut que je fasse ami-ami avec des gens qui méprisent les elfes et qui seraient très heureux de me voir morte pour convaincre un capitaine soûl qui me déteste et qui me blâme pour tout de me laisser partir? Je ne partirai vraiment jamais d’ici…

Link a réussi de peine et de misère à convaincre une servante de me préparer une chambre en lui disant que j’étais totalement inoffensive et en lui montrant mes bracelets anti-magie. Je me suis ramassée, un ensemble de draps en main, dans le coin le plus reculé de la maison : un charmant grenier rempli de toiles d’araignée, de poussière et probablement de souris. J’ai fait aérer et j’ai entrepris un ménage du printemps qui ne devait pas avoir été fait depuis une éternité. Tant qu’à être prise à rester ici pour un temps très indéterminé, autant que ma chambre soit pseudo-acceptable.

Quand j’ai eu fini mon début de ménage, j’ai décidé de descendre aux cuisines. La cuisinière a eu une réaction semblable à celle des autres : de l’incrédulité suivie de mépris. Link était là, mais quand il a essayé de prendre mon parti, elle lui a enlevé son assiette. J’ai finalement eu droit à un petit quelque chose que la cuisinière aurait volontiers saupoudré d’arsenic ou de mort-aux-rats. Je me serais volontiers rendue utile auprès de la cuisinière, mais elle ne semblait disposée qu’à me faire tester des recettes avec de la viande, sachant très bien que ça allait me rendre malade. Je suis donc partie, encore plus déprimée qu’à mon arrivée.

Comment vais-je y arriver? Comment puis-je abattre toute seule un mur si épais de préjugés, de haine et de mépris? Je vais essayer, mais j’ai peur d’y laisser le peu de sanité mentale que je possède encore…