jeudi 17 juillet 2008

Entry 7

C'est finalement fini!! Wouhou!!!!

Cher journal,

Après un rapide coup d’œil sur la carte de Sakurako, François a conclu que nous en avions pour six semaines de voyage jusqu’à Tashikani. Cela me semblait un peu long pour nous rendre jusqu’à une ville où nous nous rendons juste parce que nous n’avons rien d’autre à faire ou pour certains, parce qu’une vieille femme un peu folle leur a dit. Mais bon, comme François a dit : là ou ailleurs. C’est vrai que ça ne change rien.

Nous avons marché toute la journée, en silence. Ce fut plutôt pénible pour moi, qui était habituée à discuter de choses et d’autres avec ceux avec qui je voyageais. Mais personne ici ne semblait avoir envie de parler. J’aurais bien aimé parler avec François (nos discussions étaient toujours très intéressantes), mais il marchait en avant de tout le monde, main dans la main avec Quentin. Et il avait l’air de bouder. Je me demande pourquoi… Quoiqu’il en soit, le moment était mal choisi pour aller le voir. Je dois avouer que j’ai été un peu… non pas jalouse, mais plutôt déçue. Comment aurais-je pu être jalouse de sa propre sœur qu’il venait à peine de retrouver? J’étais déçue parce que je m’étais habituée à sa présence à mes côtés, aux discussions que nous avions. Il ne m’avait jamais donné aucune raison de penser qu’il me ferait du mal et il était sans l’ombre d’un doute, le plus civilisé ici. Je pensais qu’il voyagerait à côté de moi, mais il a préféré rester avec sa sœur. Tant pis.

Je suis donc restée dans mon coin, chantonnant pour ne pas déranger personne. J’aurai sans doute bien d’autres occasions de parler avec François de toute façon, alors pourquoi m’en faire? Les deux jumeaux ne semblaient pas vouloir s’arrêter. Le soleil était déjà couché quand Sakurako a commencé à se plaindre qu’elle était fatiguée. Pauvre chouette, elle ne doit pas être habituée à de si longs efforts physiques. Quentin a tiré sur la manche du chandail de son frère.
-Quoi? Non…
-…
-Non. Non!
-…
Quentin ne lui a rien dit et ne lui a jeté que quelques regards qui furent suffisants pour le faire capituler. Nous nous sommes donc arrêtés pour la nuit. Chacun restait dans son coin. I guess they all have a lot on their mind. Dommage, mais je vais y survivre. Ça va me donner l’occasion de commencer mon nouveau roman. C’est une histoire d’amour, de guerre et de trahison. Ça a l’air vraiment bien. La prochaine fois, je devrais essayer un nouvel auteur. Ou alors une nouvelle collection. J’ai remarqué qu’il y en avait plusieurs à la dernière librairie. Je me demande quelle est la différence entre la rouge et la mauve?

J’ai sorti une ration et j’allais commencer à manger quand le bruit très intense d’un estomac qui gargouille m’en a empêchée. C’était Abigail. Elle avait bien évidemment faim, mais elle ne disait rien. Elle m’était trop sympathique pour que je la laisse mourir de faim et de toute façon, il me restait quelques rations dans mon sac.
-Tiens!
-T’es sûre?
-Oui, j’en ai d’autres.
-Merci!
-De rien!
Je la trouve vraiment gentille. Il faudra que je prenne le temps de faire plus ample connaissance avec elle un de ces quatre. Certains du groupe se sont débrouillés avec les moyens du bord pour se trouver un souper. Maël a réussi à capturer un lièvre, mais en le dépeçant (Yark! Pourquoi je regarde ça? C’est sick!) elle s’est rendue compte qu’il s’agissait d’une maman lièvre et elle a été incapable de la manger. Elle avait l’air si piteuse que je suis allée la pater. Quant à notre nouveau venu, Biloss, il a prouvé son efficacité. Quentin a creusé un trou dans le sol et a mis un genre de toile dedans. Biloss a ensuite fait apparaître de l’eau dedans. J’ai ainsi pu remplir ma gourde.

Mon repas terminé et quelques chapitres de lus, j’ai commencé à me préparer pour me coucher. François est venu me voir et m’a tendu sa couverture.
-J’en ai déjà une.
-Pour la deuxième fois, vous allez mettre votre tête sur quoi?
-…D’accord, merci.
Que répondre à ça? Rien du tout. Je dors effectivement mieux avec une autre couverture pliée sous moi. J’apprécie sa gentillesse, mais je ne veux pas trop dépendre de lui. Je sais que le monde est un endroit difficile et dur, mais je dois quand même apprendre à me débrouiller toute seule. Il rend tout plus facile pour moi, mais je risque de m’y habituer s’il continue. Ce n’est pas que ce soit une mauvaise chose qu’il soir gentil, ça l’est, mais si je me repose trop sur lui je risque de devenir dépendante de lui. Et je ne veux pas ça. I want to become strong by myself because François is not always going to bet there to make the bad things go away.

J’ai étendu la couverture par terre et j’ai remarqué que Sakurako demandait à Takeo pour brosser ses cheveux. Elle disait qu’ils étaient trop emmêlés pour pouvoir laisser une pixie vivre là. Elle a réussi à le convaincre. Je dois admettre que c’était un spectacle assez amusant, de voir la petite arcadienne brosser les cheveux du samouraï qui avait l’air découragé. C’était amusant et aussi fascinant : tout le monde avait les yeux fixés sur eux. Takeo n’a cependant pas voulu se laisser faire des tresses. Sakurako avait l’air déçue.
-Sakurako, aie-je commencé, mes cheveux ne sont pas aussi longs, mais tu peux me faire des tresses si tu veux.
Elle a eu l’air toute contente. Elle s’est placée derrière moi et elle m’a brossé les cheveux avant de me faire des tresses. Je lui ai ensuite fait la même chose. Puis fut venu le temps du dodo. Je me suis couchée en petite boule sur la couverture de François, entourée de la mienne, et je suis partie au pays des songes.

Après une nuit sans problème, je me suis réveillée au son du chant des oiseaux. Sweet melody… Tout le monde était déjà à peu près réveillé. Je me suis assise et j’ai entrepris de défaire les nombreuses tresses que Sakurako m’avait faites la veille et ensuite de me peigner.
-Pourquoi les filles prennent toujours du temps à se préparer? a commenté François.
Je me suis sentie visée par le commentaire alors je n’ai rien dit. Je suis une fille et je suis effectivement en train de retarder les autres. J’ai donné quelques coups de brosse supplémentaires dans mes cheveux et je les ai attachés sommairement. J’ai resserré ma couverture sans vraiment la plier, mais j’ai quand même pris le temps de plier celle de François. Il avait été gentil de me la prêter, alors je ne pouvais pas la lui redonner dans cet état.
-Tenez, merci.
-De rien. Vous voulez monter?
-…D’accord.
(Il y avait une éternité que je n’étais pas grimpée sur un cheval. J’espère ne pas trop faire une folle de moi.)
Il m’a aidée à monter et a gardé les reines dans ses mains. Peut-être qu’il s’imaginait que je ne savais pas me débrouiller sur un cheval? Ou alors il voulait juste rester près de moi…?
-Quelqu’un connaît une chanson? a demandé Quentin.
-Moi! lui aie-je répondu.
Qu’est-ce que je pourrais bien chanter? Quelque chose d’entraînant… Une chanson de voyage… Je me suis creusée la tête durant quelques secondes et j’ai fini par trouver une chanson qui ferait l’affaire.

Go Leila, tu es capable. J’ai commencé à chanter et j’ai chanté durant un long moment. C’était d’ailleurs le seul son qui était entendu pendant que nous voyagions. J’ai arrêté quand ma gorge a commencé à être sèche.
-Jolie voix, m’a complimentée François.
-Merci.
-La prochaine fois, ça sera mon tour.
-(Vous chantez?) D’accord.
Vous ne m’aviez pas dit que vous saviez chanter. J’ai hâte d’entendre ça… Avec la voix que vous avez, je suis certaine que ce sera très bien. Biloss s’est approché du cheval et a dit à François qu’on déviait du chemin qui devait nous mener à Tashikani. François lui a répondu qu’on avait le choix de voyager à travers forêt et montagne ou de prendre un autre chemin pour trouver un moyen de transport. Trouver un moyen de transport? Je me demande de quoi il s’agit… Biloss lui a proposé son aide et François lui a demandé s’il était honnête. «Pas vraiment», lui a dit Biloss. J’ai préféré ne pas me mêler de la conversation. Si quelque chose de pas très légal était prévu et que j’intervenais, la discussion risquait de s’envenimer.

À la fin de la journée, un gros village a été aperçu au loin. Enfin! La civilisation!
-Pour ceux qui veulent dormir à la belle étoile, a commencé François, voilà un chêne. Pour les autres, il y a l’auberge.
Maël, Takeo et Sakurako sont restés derrière. Moi je suis restée sur le cheval, dont François tenait toujours les rênes. Nous sommes allés jusqu’à l’auberge, mais François a continué jusqu’à l’écurie. Il m’a aidée à descendre puis il s’est occupé des chevaux. Tout le monde était parti alors j’ai décidé de rester avec lui pour lui tenir compagnie. Quand je dis «tenir compagnie», je veux dire le regarder s’occuper des chevaux. Je suis capable de m’occuper d’un cheval, mais pas avec autant de plaisir que François. Il aime les chevaux, c’est évident. Quand il a eu fini, nous sommes rentrés à l’auberge pour retrouver tout le monde. Nous sommes allés rejoindre Quentin, qui parlait avec l’aubergiste. Une chambre à un lit c’était 1 pa et une chambre avec deux lits c’était 3 pa, mais le déjeuner était compris.
-Vous voulez qu’on prenne une chambre à trois? m’a proposé Quentin.
-Ils ont des chambres à trois lits?
-Ne vous en faites pas avec ça.
-D’accord.
Ça va me faire plaisir de partager leur chambre. Ça me donnera peut-être l’occasion de faire plus ample connaissance avec Quentin.
-Qui garde la clé? m’a demandé Quentin.
-…Je peux la garder, lui aie-je répondu.
-D’accord, tenez. De toute façon, je peux ouvrir la porte sans.
Je vois… Tu es douée pour ce genre d’activités…

J’ai laissé les deux jumeaux et je suis montée à l’étage pour déposer mes affaires dans la chambre. Je les ai ensuite rejoints à une table pour le souper. Le reste du groupe était éparpillé un peu partout dans la salle.
-Alors Quentin, parle-moi de toi! lui aie-je demandé.
-Je ne pense pas que vous ayez envie de savoir.
-Mais oui! Raconte-moi tout en détail!
-C’est simple, m’a répondu François. Courir, meurtre, courir, meurtre…
-Mais avant «courir-meurtre», qu’est-ce qu’il y avait?
Quentin est devenue blanche comme un drap et elle a détourné le regard.
-Je ne m’en souviens pas, m’a-t-elle répondu.
Oups, j’ai gaffé. Je ne voulais pas raviver des mauvais souvenirs. Désolée Quentin.

Bon… Je pense que je vais arrêter de discuter avec eux. Si je cherche à en savoir plus, Quentin sera encore plus mal à l’aise et François risquerait de se fâcher contre moi parce que sa sœur se sent mal à cause de moi. I’ve seen himwhen he’s angry and I wouldn’t want him to feel that way towards me. I think it would scare me. Je ne pouvais pas parler avec Quentin, mais je n’avais pas envie de passer tout le souper en silence. Il y a bien ces bardes qui mettent un peu d’ambiance dans la salle, mais ils ne sont pas si terribles que ça. Enfin, ils ne sont pas mauvais, mais ils pourraient être meilleurs. Mmmm… Biloss a l’air d’avoir la parole facile. Je lui ai demandé de me parler de son passé et il n’a pas eu de problème à le faire. Il m’a dit qu’il était orphelin et qu’il avait été chassé de son village. Il avait ensuite traîné pendant un moment avec des marchands qui étaient sympas. J’aurais bien voulu lui poser quelques questions, du genre : d’où venait-il exactement? Quelles raisons l’avaient poussé à l’exil? Comment s’était-il retrouvé à voyager avec les marchands et pourquoi les avait-il quittés?

J’aurais voulu lui demander beaucoup de choses, mais François et Quentin nous ont distraits. François a murmuré quelque chose à l’oreille de sa sœur et celle-ci a quitté la salle. Il a ensuite sorti des trucs de son sac et a commencé à les assembler. Biloss avait un point d’interrogation au-dessus de sa tête, mais moi j’ai su tout de suite qu’il s’agissait d’un instrument de musique. Mais que voulait-il faire avec? En jouer bien sûr, mais… Oh. C’est peut-être à ça qu’il faisait allusion quand il disait que la prochaine fois c’était lui qui allait chanter. Alors il sait chanter et jouer d’un instrument? Je me demande quels autres talents cachés il a… Quand il a eu fini d’assembler son instrument, il est allé s’installer plus loin dans la salle. Il a commencé à jouer et à chanter et Quentin est arrivée et… Elle avait l’air de danser très bien, elle était… très aguichante avec les clients et habillée vraiment trop sexy, mais je dois avouer que je ne l’ai pas vraiment regardée. Mon regard était fixé sur François et mes oreilles concentrées sur sa voix. Il chante… vraiment bien… Sa voix est aussi belle sinon plus que lorsqu’il fait simplement parler. Sa voix est… si… captivante… Dieu merci, j’ai réussi à ne pas le regarder avec la bouche grande ouverte, mais je ne l’ai néanmoins pas quitté des yeux tout le temps qu’il a chanté. Ça m’a cependant gênée un peu de le regarder autant et j’ai détourné le regard à quelques reprises.

Quand le spectacle fut fini, des applaudissements se sont fait entendre de toutes parts et des clients leur ont lancé des pièces. J’étais trop sous le choc pour faire autre chose qu’applaudir. Quentin a ramassé les pièces et elle est partie. François s’est levé et est venu vers nous.
-Bonne nuit groupe.
-…Bonne nuit…
(Ça c’était moi.)
Il a ensuite pris la direction des chambres.
-Wow…
(Ça c’était encore moi.)
Je n’en reviens toujours pas à quel point il chante bien. Je me sens presque poche à côté de lui. Peut-être qu’on pourrait chanter quelque chose ensemble un jour? Ou je pourrais lui demander de me montrer comment jouer de son instrument? Il y a tant de choses qu’il pourrait m’apprendre et qui me seraient utiles : jouer de son instrument, avoir le sens de l’orientation, danser, jouer aux cartes, être capable de repérer des traces dans le sol… J’admets que pour la danse, la musique et les cartes c’est un peu moins utile, mais ça serait amusant. J’ai bien aimé danser. Juste pour le plaisir de voir les regards d’étonnement de mes parents le jour où je leur montrerais que je sais danser, je devrais demander à François de continuer à me donner des leçons. Enfin… Ça c’est si jamais je revois un jour mes parents…

Le choc du spectacle passé, j’ai décidé de monter me coucher. Dans la chambre, j’ai trouvé François assis sur son lit et Quentin assise par terre à compter méthodiquement les pièces qu’ils avaient gagnées : l’or avec l’or, l’argent avec l’argent et le cuivre avec le cuivre. C’était fascinant de la regarder faire.
-Vous avez des problèmes d’argent? m’a-t-elle demandé, en voyant que je l’observais.
-Non, non! J’étais fascinée, c’est tout!
Elle est retournée à son comptage et moi je me suis préparée à me coucher. «Préparer» est un bien grand mot en fait. J’ai enlevé mes bottes et je me suis glissée sous les couvertures. En temps normal, j’aurais enlevé mon habit de voyage pour ne garder que ma tunique verte, mais en ce moment… En ce moment, il y avait un homme dans la pièce. Ma tunique avait beau ne pas être ce qu’il y avait de plus révélateur, elle laissait quand même voir trop de mes jambes pour que je me sente à l’aise de la porter devant François. J’ai souhaité bonne nuit aux jumeaux et j’ai fermé les yeux. Je me suis endormie en entendant dans ma tête François qui chantait. I like his voice…

Quand je me suis réveillée le lendemain matin, le silence régnait dans la chambre. Je me suis étirée et j’ai regardé autour de moi. François dormait dans le lit d’à côté, mais aucune trace de Quentin. Je ne voulais pas réveiller François juste pour lui demander s’il voulait déjeuner (et puis m’approcher aussi près d’un homme que je connais à peine alors qu’il dort, ce n’est pas très convenable, non?), alors j’ai rassemblé mes affaires en essayant de faire le moins de bruit possible. Je me suis levée sur la pointe des pieds et je me suis dirigée vers la porte.
-Salut beauté…
Je me suis aussitôt immobilisée et je me suis lentement retournée vers lui.
-…Salut. Désolée, je ne voulais pas vous réveiller.
-Ça va. Une plume qui tombe par terre me réveillerait.
-Ok. Où est Quentin?
-Peut-être sous le lit…?
-…
J’ai eu envie de vérifier, mais je me suis retenue. J’aurais eu l’air de quoi? D’une fille vraiment trop curieuse.

-Vous voulez aller déjeuner? lui aie-je demandé.
-D’accord.
Il a tassé ses couvertures et il s’est assis sur le lit. Il était torse nu. Je me suis aussitôt retournée dos à lui. S’il me voyait le visage en ce moment, il verrait que j’étais rouge tomate. J’étais terriblement gênée. Ça, c’était une situation inconvenante : être aussi près d’un homme qui est torse nu et qui n’est ni mon petit ami ni mon mari. C’est vrai, j’ai vu très accidentellement Kikuchi avec encore moins de vêtements, mais avec François, ce n’était pas pareil. J’étais rouge comme une tomate, mon cœur battait plus vite et il y avait cette petite voix, très loin dans le fond ma tête, qui me murmurait tout bas, de façon à ce que n’importe quel bruit l’aurait cachée, mais juste assez pour que je l’entende : retourne-toi… Je ne l’ai bien entendu pas fait et j’ai attendu sagement qu’il s’habille.
-Désolé, je n’avais pas pensé à…
-Ça va, pas de problème…
(J’ai juste failli avoir une crise cardiaque, façon de parler)
Quand il fut de nouveau décent, il s’est approché de moi et m’a ouvert la porte pour que je sorte en premier. Je lui ai fait un petit signe de tête pour le remercier de sa galanterie et je me suis dépêchée de sortir de la chambre. J’espère qu’il n’a pas remarqué que j’étais toute rouge…?




Nous sommes descendus en bas et nous nous sommes assis à une table. François a fait signe à l’aubergiste et lui a demandé de façon autoritaire le petit déjeuner.
-Tout de suite monsieur! Tenez! Il est très content de vous voir!
Il nous a servis des bols de gruau avec deux œufs dedans qui étaient placés comme si c’était des yeux. François et moi nous nous sommes regardés, incrédules. Est-ce que notre bol de gruau est vraiment en train de nous regarder?
-C’est une coutume humaine? a demandé François.
-Non, lui a calmement répondu Takeo, qui était assis plus loin.
(Tout de même, merci mon dieu d’avoir fait de moi une elfe!)
Nous avons mangé rapidement et François nous a ensuite demandé si nous avions des trucs à faire avant de partir. Nous étions quelques uns à devoir faire des commissions alors nous sommes partis en ville. Je n’avais que des rations à acheter, alors je suis rapidement revenue à l’auberge.

Tout le monde étant réuni, nous avons pu partir tout de suite. François m’a encore proposé de monter sur un cheval et j’ai accepté. Ça fait du bien de reposer un peu mes pieds. C’était une très belle journée pour voyager et rien ne prédisait que quoi que ce soit aurait pu la troubler. Nous étions sur la route, c’était le calme plat quand des bruits se sont faits entendre plus loin sur la route. Quand j’ai regardé au loin, j’ai vu des cavaliers qui venaient vers nous. Je ne pouvais pas voir s’ils étaient hostiles ou pas, mais je n’ai pas voulu prendre de chance. J’ai donc sorti mon arbalète, juste au cas.
-C’est bien, m’a complimentée François, vos réflexes se développent.
-…
Réflexes ou intelligence, je ne sais pas, mais quoi qu’il en soit, pleins de gens nous courent après pour diverses raisons que je ne connais pas alors mieux vaut être préparés au pire. Je me suis aussi mise à chanter, pour encourager tout le monde. Mon intuition m’a bien servie, car il s’agissait effectivement de gens hostiles. Ils étaient environ une douzaine et ils étaient habillés tout en noir.

Durant le combat, nous avons malheureusement été divisés en deux groupes, car Sakurako a créé un mur d’eau et nous a sans le vouloir séparés. Je n’avais pas particulièrement envie de me battre, mais comme je n’avais pas le choix, autant le faire par terre. Je ne me sentais pas du tout à l’aise de me battre sur un cheval. Je n’ai pas réussi à toucher quelqu’un (je ne voulais pas tuer, juste blesser), mais je ne me suis pas fait toucher non plus. Je commençais à me sentir un peu inutile. Tout le monde semblait bien se débrouiller et les cadavres s’accumulaient. Ça, c’était en train de me rendre malade. Pourquoi il faut absolument tuer? Pourquoi nous ne pourrions pas seulement les mettre inconscients, prendre leurs chevaux et partir? J’aurais voulu faire plus pour aider à part chanter, mais ça ne semblait pas possible pour l’instant. Quand le mur d’eau a finalement disparu, j’en ai eu l’occasion. Takeo et Maël semblaient blessés plutôt sérieusement, alors j’ai couru vers eux. Je n’avais pas beaucoup de sorts, mais je pourrais quand même en healer un des deux et faire des bandages à l’autre.

J’ai commencé par me diriger vers Takeo, comme il était un peu plus près, mais Quentin est arrivée avant et elle lui a donné quelque chose qui a eu l’air de le healer complètement. J’ai donc bifurqué vers Maël. J’ai à peine eu le temps de poser mes mains sur elle qu’elle me repoussait en me mordant le bras. Ow! Pourquoi tu me mords? Je voulais juste te healer, pas t’attaquer. Ça va m’apprendre à vouloir aider tout le monde. Je n’avais pas envie d’attendre là et risquer qu’elle m’attaque encore (elle avait l’air assez enragée comme ça) alors j’ai décidé de rebrousser chemin vers la seule zone de sécurité que je connaissais en ce moment : François. Mais les choses étaient aussi sécuritaires de ce côté qu’ici : Abigail était en train d’attaquer François. J’en ai manqué un bout ou quoi? Je sais bien que ce n’est pas l’amour fou entre eux, mais de là à s’attaquer… Elle a réussi à le toucher quelques fois, mais pas assez pour que sa vie ne soit en danger. Tant mieux. Quentin s’est interposée entre les deux et elle a été blessée. Le combat s’est terminé après ça. Quentin a demandé à Abigail si elle avait vraiment essayé de tuer son frère et Abigail a admis que oui sans broncher. Et elle n’a même pas pu fournir de raisons à son geste. Quentin ne s’est pas gênée pour la gifler. Elle avait l’air très choquée. Je l’étais aussi et également déçue, très déçue. Je la trouvais super sympathique et voilà ce que ça donne. François avait raison. Les méchants ne portent pas toujours des étiquettes «Je suis un méchant». Il avait aussi raison en ce qui concerne Abigail, quand il disait qu’elle finirait par me blesser. Ce n’est pas moi qu’elle a attaquée mais ça m’a quand même blessée. Alors d’est ça que ça donner, quand on trouve des gens gentils et/ou qu’on veut les aider? On se fait attaquer? Ça va m’apprendre à vouloir aider les autres sans me poser de questions. Je vais faire plus attention la prochaine fois.

Je suis allée rejoindre François et Quentin. Il était en train de bander un de ses bras alors je me suis occupée de l’autre.
-Je me sens comme une momie, a commenté Quentin.
-Je vois un bleu sur le front, lui aie-je dit. On pourrait peut-être mettre des bandages tout autour de la tête?
-Oui, on pourrait, a répondu François.
Il avait l’air très fâché contre elle. Je crois que ça a un rapport avec ce qu’elle a donné à Takeo pour le soigner (et aussi avec le fait qu’elle s’est fait blesser inutilement). J’aurais aussi été fâchée si ma sœur avait pris de tels risques. Moi, fâchée? J’ai un peu de difficulté à l’imaginer. Momie-Quentin n’ayant plus de centimètre de peau visible à part sur sa tête, j’ai décidé de m’occuper de son frère. Ses blessures n’étaient pas graves, mais il fallait néanmoins qu’elles soient soignées. Je suis allée m’assoir à côté de lui et j’ai bandé ses plaies du mieux que je pouvais.
-Ce n’est pas nécessaire, a-t-il protesté.
-Hé!
(Ce n’est pas le moment de faire ton fier! Tu es blessé alors je m’occuper de toi et tu n’as pas ton mot à dire!)
François s’est penché vers moi.
-Ce n’est pas moi qui vais se plaindre que vous me touchiez, m’a-t-il murmuré tout bas.
-…
Je me suis immobilisée quelques secondes et j’ai continué à faire son bandage les yeux bien fixés sur son bras. Je n’ai rien dit, mais je n’ai pas pu m’empêcher de sourire. Je suis contente que ça vous ne dérange pas parce que moi ça ne me dérange pas. Enfin… Je veux dire… Je vous fais confiance et… et… je crois… je crois que vous me plaisez...
Oh mon dieu… Est-ce que je viens vraiment de penser ça? J’espère qu’il ne peut pas lire dans les pensées… S’il ne le peut pas, il n’aura qu’à me regarder pour se douter de quelque chose. Je suis si transparente et tellement mauvaise menteuse. Il n’aura qu’à me poser les bonnes questions et il se doutera de quelque chose. Mais je ne devrais pas m’en faire avec ça. Je ne sais pas ce qu’il pense de moi et de toute façon, ça n’a pas d’importance. J’ai cru comprendre qu’il avait déjà… été avec au moins une fille et je ne suis pas assez idiote pour ne pas savoir qu’un homme s’attend à… certaines choses d’une fille qu’il fréquente. Quel que soit l’intérêt qu’il me porte, j’imagine déjà sa réaction quand je lui dirai que je ne peux rien faire avant le mariage parce que j’ai été élevée comme ça. Il va probablement s’enfuir en courant.

J’ai fini de m’occuper de lui sans dire un mot. J’avais trop peur de me mettre à bafouiller ou rougir. Je me suis ensuite éloignée en faisant mine de me dégourdir les jambes. J’ai vu Takeo s’approcher de François et lui dire que s’il voulait tuer Abigail, personne ne s’interposerait.
-Je ne commets pas de meurtre devant ma sœur, lui a-t-il répondu. Ça ne sera pas un combat, ça sera un meurtre.
La discussion ne me plaisait pas, mais je ne m’en suis pas mêlée. Je pouvais comprendre qu’on ait envie de se venger de quelqu’un qui a essayé de nous tuer et qui a blessé la personne qu’on aime le plus au monde, mais… un meurtre? Il n’y aurait pas d’autres solutions? Genre… La chasser du groupe? Ça ne servirait à rien que j’en parle, personne ne m’écouterait de toute façon. Il fallait maintenant nous remettre en route. Nous n’aurions aucun problème de moyen de transport. Biloss avait passé une partie du combat (et après) à courir après les chevaux de ceux qui nous avaient attaqués.
-On part? a demandé François, en me regardant.
J’ai pensé sur le coup qu’il sous-entendait lui, Quentin et moi et je dois avouer que pour une fois, j’aurais vraiment été tentée d’accepter de quitter le groupe.
-Oui, lui aie-je répondu, juste le temps que je me repatche.
Maël m’avait peut-être seulement mordue, mais une morsure à 4 points de dégât, ça fait mal. François s’est approché de moi et il m’a pris mes bandages des mains. J’étais mal placée pour protester et dire que je pouvais m’en sortir toute seule, alors je l’ai laissé faire, le regard fixé sur ses mains.

Il m’a ensuite fait monter sur le cheval (pourquoi je ne lui dis pas que je peux le faire toute seule?) et tout le monde en selle (ça a été assez drôle de voir les réactions de Maël et de Takeo avec les chevaux), nous sommes partis. Nous avons chevauché toute la journée, jusqu’à ce qu’il fasse nuit. J’étais si fatiguée, physiquement et émotionnellement, que je me suis dépêchée de manger ma ration pour pouvoir me coucher au plus vite. Ma blessure n’était pas grave, mais je préférais ne pas enlever mon bandage tout de suite. Mmmm… C’est plus difficile que je le pensais, se faire un bandage sur le bras. Je n’ai pas eu à me creuser la tête bien longtemps. Quelqu’un est apparu à côté de moi comme par magie pour m’aider à refaire mon bandage. C’était bien sûr François. Il a refait mon bandage et il m’a ensuite encore prêté sa couverture. Cette fois-ci, je n’avais pas la force de protester. Je l’ai donc remercié et après son départ, je me suis enroulée dans nos deux couvertures. Il va vraiment falloir que je pense à m’acheter une autre couverture, parce que je ne peux pas constamment dépendre de lui comme ça. Je dois devenir plus forte. Oui, plus forte… Je me demande si je vais l’entendre chanter de nouveau un jour…?

6 bisou:

Yamaël a dit…

Même si Leila semble un peu naive et souhaiterais un groupe uni, elle reste néanmoins très forte. J'ai hate de voir comment la relation Leila/François vas se dévelloper =D

Quentin a dit…

Il te plait?! Je comprend pas pkoi; il fait pourtant rien de special pour capter ton attention... lol

Chanter? Ben, t'as qu'a lui demander. ^^^Il va surement pas se faire prier; c pas comme si c'était une corvée. Et t'as qu'à dire que c pour tes bo yeux. lol

Lyra a dit…

Lui demander de chanter? Je ne sais pas si je vais oser...

Même si je le fais, jamais je n'oserais lui dire que c'est pour mes beaux yeux. Ça serait comme lui dire: Tu me plais, alors chante pour moi s'il te plaît.

Eos / Michael a dit…

mais tu lui plaît, alors où est le mal ? en tout cas si tu ne lui plaisait pas, il est vraiment bon comédien, tu es la seule à qui il apporte de l'attention

Saï a dit…

ffectivement, Francois est oburré de charme, et ils sont pas mal dirigés vers Leila. Je me disais bien qu'elle ne pourrais pas y rester insensible bien longtemps.

Et c'est vrai, plus on en lit, plus on se rend compte qu'elle est pas aussi naive que ce qu'elle reflète aux autres.

Elle sait que le monde n'est pas fait d'oiseaux roses bonbon mais tente quand même de le rendre plus joyeux, et ça c'est bien. :)

Lyra a dit…

C'est vrai que Leila pourrait paraître «le monde il est beau, il est gentil» pour ceux qui ne la connaissent pas.

Elle sait qu'il y a du bien comme du mauvais dans le monde (chez les individus et de façon globale)mais elle ne veut pas être méfiante et se limiter à croire que tout le monde risque de la blesser.

Elle a besoin de croire en la nature humaine (ou elfique ou arcadienne, lol) des gens qui l'entourent. Elle a besoin de trouver du positif , de créer de la joie autour d'elle. Ce n'est peut-être pas la meilleure façon de réagir, mais c'est la sienne. Elle a besoin de trouver du bien dans ce qu'elle fait, dans ce qu'elle vit, autrement je ne pense pas qu'elle serait capable de continuer.