dimanche 16 octobre 2011

Le prince Gnuhanhanhan est mon nouveau meilleur ami pour la vie

12 avril

Quand le jardinier est arrivé, il m’a carrément ignorée. J’ai fini par avoir son attention quand je suis allée me planter devant lui et qu’il n’a eu d’autre choix que de s’arrêter. Je lui ai demandé si je pouvais l’aider et tout de suite il a pensé que je voulais tuer les plantes ou trouver des plantes pour tuer quelqu’un. Non, je veux vraiment seulement aider…

Une servante est passée et lui a dit qu’il devrait me laisser faire et que les plates-bandes à l’arrière avaient besoin d’être désherbées. Est-ce que je vois du travail en perspective…? Pendant que le jardinier réfléchissait, je lui ai mentionné que je n’avais pas peur de me salir les mains ni de travailler fort. Il a fini par accepter. Oh ouais! Je vais pouvoir aider! Je vais pouvoir… désherber ces trois plates-bandes pleines de ronces… avec pour seuls outils mes deux mains… Est-ce que c’est moi ou est-ce que je ne viens pas de me faire avoir?

Je devais en effet tout arracher à mains nues, sans gants ni instruments. Quand j’aurais fait un tas assez gros, je devais l’apporter au jardinier. J’ai passé toute la journée, jusqu’à l’heure du souper, à me faire saigner les mains et les bras, à enlever les ronces d’une moitié de plate-bande. C’était douloureux et pas du tout agréable, mais je ne voulais pas abandonner. Jamais je ne donnerais au jardinier la satisfaction de me voir me plaindre.

À la fin de ma journée, je suis allée faire mon rapport au jardinier et je suis partie en lui disant bonjour et en le remerciant. Il m’a regardée bizarrement. Quoi? C’est si étrange que ça que je sois aimable avec vous?

Dans ma chambre, j’avais commencé à nettoyer mes blessures quand Sophie est venue me porter mon souper. Quand elle a vu mes bras, j’ai dû lui donner comme excuse bidon que je n’étais pas très douée avec les plantes. Elle m’a dit qu’elle m’apporterait une pommade. C’est finalement Maggie qui me l’a apportée et j’ai dû répéter que je n’étais pas très bonne avec les plantes.

Elle m’a demandé si j’avais eu l’occasion de le croiser. Euh, non et j’espère que ça n’arrivera pas. Elle m’a répondu que je ne pouvais pas rester ici des années sans lui parler. Et qu’est-ce que je pourrais lui dire? Bonjour! Vous me détestez, moi aussi, mais comment ça va? Elle a suggéré de rester dans la même pièce, même sans rien dire, que ça serait bien. Des plans pour qu’il pense que je complote je ne sais pas quoi en l’espionnant. De toute façon, je n’ai pas l’intention de rester ici des années. Oui, je sais, le seul moyen de partir c’est d’avoir Lemleck de mon côté. Et je sais aussi que sneaker sur le bateau n’est pas une option. Mais qu’est-ce que vous suggérez? Bonjour! Vous me détestez, moi aussi, mais laissez-moi partir s’il vous plaît? Je vois ça d’ici…

Maggie m’a reparlé de mon insomnie. Ah oui… C’est sans doute à cause du fantôme qui n’arrête pas de me déranger pour que j’aille dans l’aile ouest. Je veux dire, oui, vous avez raison, je ne dors pas très bien ces jours-ci. Elle m’a donc apporté une tisane relaxante et pour la première fois depuis des jours, j’ai bien dormi.

13 avril

J’ai travaillé sur les plates-bandes jusqu’à l’heure du souper. J’ai terminé la première plate-bande et j’ai commencé la deuxième. J’allais faire mon rapport au jardinier quand j’ai vu le carrosse de l’elfe arriver. J’ai préféré attendre qu’elle entre avant d’y aller. J’ai encore remercié le jardinier et je lui ai souhaité une bonne fin de journée. Je l’ai entendu murmurer que les elfes étaient masochistes. Quoi? Non, je veux juste vous prouver que je peux travailler fort.

Quand je suis entrée, j’ai vu Lemleck descendre les escaliers. J’ai aussitôt fait demi-tour et je suis retournée travailler dans mes plates-bandes cinq-dix minutes, en espérant que ça serait suffisant pour qu’il soit parti. Éviter une confrontation… ♫

Quand je suis retournée jeter un coup d’œil, il n’était plus là. Je me suis donc dépêchée de courir jusqu’à ma chambre avant de risquer de retomber sur lui. J’ai eu droit à la visite surprise de Maggie, qui était super motivée pour manger avec moi. Ça m’a fait plaisir, parce que je n’avais pas souvent l’occasion d’avoir de la compagnie. Elle m’a dit que je pouvais venir manger avec elle si je le voulais. Dans la cuisine? Bonjour madame la cuisinière qui me déteste! Je viens envahir votre domaine le temps d’un repas! Euh, non, je ne crois pas. Maggie a suggéré d’installer une table dans le hall d’entrée. Pas très discret. Et puis, je me ferais sans doute accuser d’espionner les allées et venues de tout le monde.

Maggie n’aimait pas trop l’elfe et c’est pour ça qu’elle était venue me voir. J’ai fini par lui mentionner que j’avais déjà parlé à l’elfe. À voir son regard, je ne suis pas certaine que ça ait été une bonne chose. Elle m’a dit que l’elfe ne faisait rien pour rien. Oups. Je m’excuse? J’avais confiance en Maggie alors je lui ai répété ce que j’avais révélé à l’elfe. Elle a décidé d’en parler à Lemleck, mais m’a promis que ça ne se retournerait pas contre moi. Après le sujet de l’elfe, nous avons parlé de tout et de rien. Elle m’a mentionné qu’elle ne pouvait plus accomplir sa fonction et qu’elle avait été reconvertie en gouvernante de la maison. Je me demande si c’était elle la gouvernante des enfants…

14 avril

Vers 1 heure du matin, j’ai été réveillée en sursaut par ma porte qui s’est ouverte en grand. C’était Lemleck, qui était, oh surprise, complètement soûl. Il avait aussi l’air très fâché. Oh, oh… Qu’est-ce que j’ai fait encore? Il a exigé de savoir mon nom. Oh non… J’ai fait l’erreur d’hésiter et ça l’a mis plus en colère. Il s’est approché et a mis ses mains sur le lit, de chaque côté de moi. Il a encore exigé de connaître mon nom. J’avais vraiment peur qu’il ne me tue si je ne lui répondais pas alors j’ai fini par lui dire.

-Wind…

-Ton rang!

-… Mon père est marquis.

Il m’a dit qu’il espérait que ce ne soit pas un mensonge. La menace était très claire. Mais comment pouvait-il penser que je sois assez stupide pour mentir? Apparemment, en plus d’être des meurtriers sanguinaires, les elfes étaient aussi tous des menteurs. Euh, non! J’avais beaucoup trop peur pour penser à mentir!

Lemleck m’a saluée en partant, comme si j’étais quelqu’un d’important. Étrange… Et c’était si difficile que ça de fermer la porte en sortant?! Après l’avoir fait à sa place, je me suis rassise dans mon lit, les couvertures remontées jusqu’à mon nez. J’avais peur que Lemleck ne revienne et avec tous les murmures que j’entendais dans le corridor, j’aurais été incapable de dormir de toute façon.

Ce qui fut parfait, parce que c’est exactement ce moment-là qu’a choisi mon ami le fantôme pour me rendre une autre visite. Je lui ai dit plusieurs fois que je ne pouvais pas sortir parce qu’il y avait trop de gens éveillés, mais je crois qu’il n’a pas compris.

Ensuite les mêmes choses ont recommencé : meubles déplacés, flèche dans la buée qui pointait vers la chaise… J’ai eu beau lui répéter que je ne pouvais pas sortir, il n’est pas parti. Mais je veux dormir moi…

Au début, il ne m’a pas laissée déplacer la chaise. Il a fait des traces en alternance sur le lit. Et quand j’ai finalement pu m’assoir sur la chaise, il l’a balancée d’en avant à en arrière. Une chaise berçante? Est-ce que ça a un rapport avec une chaise berçante? Je ne demande qu’à vérifier, mais pas cette nuit!

Le fantôme a déposé la clé sur la vanité. Pas ce soir, merde! Il a commencé à écrire dans le miroir. H… E… L… J’ai complété avec un «P». D’accord. Help. Mais aider qui ou quoi? En-dessous de «help», il a écrit autre chose. L… A… un «c» ortho? Une barre verticale qu’il a rushée à faire… J’ai essayé différentes combinaisons pour le «c» ortho, mais il les a effacées à chaque fois.

Finalement, j’en ai eu assez. Le soleil se levait et j’étais fatiguée. J’ai replacé les meubles du mieux que je le pouvais et je me suis couchée. Dodo…

Ma tête venait à peine de toucher l’oreiller quand Maggie est entrée. Elle était plutôt agitée. Elle m’a demandé ce qui s’était passé. Le fantôme a encore foutu le bordel dans ma chambre. Je veux dire… J’ai fait un peu de réaménagement dans ma chambre, c’est tout… Ce n’est pas à ça qu’elle faisait référence : Lemleck se préparait à partir pour Idrazz’il. Oups. Je lui ai peut-être dit mon nom et mon rang… Pourquoi est-ce que j’ai l’impression qu’il ne va pas me ramener chez moi juste pour me ramener chez moi?

Maggie est partie me gagner du temps pour que je puisse me préparer. Je me suis habillée et je suis allée chercher mon sac dans le grenier et je l’ai rempli d’autres vêtements… et de la petite clé que le fantôme a encore fait tomber à côté de moi.

Je suis descendue dans le hall d’entrée. Il y avait Maggie, Link et Lemleck, qui m’a encore saluée comme si j’étais importante. Je suis perturbée. Je crois que je préférais encore quand il me traitait comme de la merde. Au moins tout était clair.

Le départ était immédiat. Malheureusement pour moi, Link ne serait pas du voyage. Il aurait voulu, mais Lemleck lui a dit non. Muuu… Mon seul ami sur le bateau ne sera pas là…

Le trajet en tête-à-tête avec mon capitaine préféré a duré une journée et demi. Dans sa grande gentillesse, il a partagé son vin avec moi. Louche… Il m’a aussi expliqué pourquoi nous allions à Idrazz’il. Il avait l’intention de me redonner à mes parents si ces derniers organisaient une grande réception où seraient présents certains membres de la cour.

Ok… Alors vous me «demandez mon aide» pour assassiner des membres de la cour royale elfique? Je ne suis pas certaine d’être d’accord. Ça me rend profondément mal à l’aise d’être impliquée là-dedans, mais en même temps… Si les circonstances étaient différentes (genre que je n’étais pas retenue en otage) et que j’avais un peu plus d’explications, j’aurais envie de l’aider. Peu importe ce qui a pu se passer, personne ne mérite de perdre sa famille de cette façon.

Lemleck m’a encore fait assez peur pour que je lui raconte ce que je savais sur mes parents. J’aimerais être plus forte, mais si je ne fais pas ce qu’il veut quand il est dans cet état, je suis certaine qu’il va ma tabasser. Il m’a demandé s’ils étaient loyaux. Je crois que oui… Il m’a aussi demandé si je croyais qu’ils me choisiraient. Je l’espère. Il m’a sorti une remarque comme quoi j’avais bien une attitude d’elfe, à penser à ma petite personne sans me soucier de qui allait mourir à ma place, la joie au cœur. Ok. Dite comme ça, je n’ai plus autant la joie au cœur. Et je ne suis plus certaine d’avoir envie que mes parents me choisissent…

Il m’a mise en garde. Si jamais j’avais menti… Il n’éprouvait aucun plaisir à torturer les gens faibles, mais… J’aurais bien voulu répliquer quelque chose, mais il avait raison au moins sur ce point : j’étais faible. J’ai dû lui répéter : Je n’ai pas menti! Je suis incapable de mentir! Je sais bien que j’étais paralysée par la peur ce matin et tout à l’heure aussi, mais je suis vraiment incapable de mentir! Quand je lui ai dit que je n’avais jamais pensé à l’attaquer dans le dos, il m’a répondu : Tu vois? Tu sais mentir. Non! J’ai beau être fâchée contre vous la plupart du temps (ça et le fait que je n’approuve pas vos méthodes), je n’ai jamais pensé à vous backstabber! J’ai eu droit à une maigre consolation : il m’a donné sa parole qu’il n’arriverait rien ni à moi ni à mes parents si nous respections notre part du marché. Yééé, c’est fou ce que je me sens rassurée… Et si mes parents ne me choisissaient pas? Qu’est-ce qui va m’arriver…?

15 avril

En soirée, nous sommes arrivés au port. Lemleck a fait une face : l’elfe était là. Elle a essayé de le convaincre de la laisser nous accompagner, me demandant silencieusement de l’aide du regard. Je n’ai rien dit. Je ne pensais pas que ça soit une bonne idée de prendre sa défense devant lui. Et en plus, elle avait l’air de lui faire des yeux doux. Euh… Et quand elle a osé se comparer à lui, j’ai tout de suite su que je ne devais pas m’en mêler et j’avais raison. Lemleck n’a pas été content du tout. Il lui a interdit de se comparer à lui. Il lui a dit qu’il n’avait pas besoin de son aide et il l’a traitée de putain royale. Il n’en fallait pas plus pour que l’elfe devienne rouge tomate et parte.

Après, Lemleck ma carrément ignorée et je suis retournée dans mon ancienne cabine. J’ai eu droit à des regards des marins qui ne me connaissaient pas et à des salutations chaleureuses de ceux qui me connaissaient. Comme je n’avais rien à faire à part me morfondre sur mon sort, j’ai repris avec joie (mais secrètement) mon rôle de couturière.

19 avril

Ce matin-là, le soleil ne s’est pas vraiment levé. Le temps était sombre et la mer de plus en plus agitée. J’ai jeté un coup d’œil dehors et quand j’ai vu des marins commencer à s’attacher, j’ai décidé de faire la même chose. M’attacher au bureau avec mes beaux draps super solides ne pouvait être qu’une excellente idée qui ne risquait certainement pas de mal se terminer, alors je me suis lancée.

Le bateau tanguait de plus en plus : tout ce qui n’était pas attaché se déplaçait. Par moment, je ne voyais que de l’eau par le hublot, mais la vitre tenait bon. J’étais relativement en sécurité, mais il a fallu, encore une fois, que je me mêle de ce qui ne me regardait pas. J’ai entendu un cri dehors et au lieu de me dire, comme toute personne sensée «il y a une grosse tempête dehors, je vais rester en sécurité dans ma cabine», j’ai préféré me dire «Il y a peut-être une personne en danger! Allons ouvrir la porte»!

Je n’ai même pas eu le temps de regarder que ma porte se faisait arracher par une vague et que je buvais la tasse. Super. Ça c’était à peu près aussi génial comme idée que de chanter pour aider les gentils pirates contre les méchants pirates. Ma «corde» tenait encore, mais à peine. Ok. Il faut que j’aille me cacher dans un endroit plus sécuritaire. Allons affronter la tempête! Mais avant je prends mon sac et… Mon sac... Où est mon sac? Merde! J’ai encore perdu toutes mes affaires!

J’avais le choix entre la cabine de Lemleck et la cale. J’ai choisi la première option, au risque de me faire revirer de bord. J’ai réussi à marcher trente secondes et je me suis fait emporter par une vague. J’ai senti (et surtout entendu) tous mes os se briser et je suis passée par-dessus bord. J’ai eu la vague impression que quelqu’un maintenait ma tête hors de l’eau et tout est devenu noir.

Je me suis réveillée sur un rocher. Je n’avais plus mal, à part au cou. En tournant la tête, j’ai vu des cheveux bleus sur ma poitrine. Euh, qui est là? J’ai entendu un son et j’ai tout de suite compris. C’était le prince Gnuhanhanhan! Mais qu’est-ce que tu fais ici? C’était lui qui m’avait sauvée, mais j’avais toujours un petit problème : je ne pouvais plus bouger ni mes bras ni mes jambes. Muuu… Je suis paraplégique… Tuez-moi quelqu’un! Muuu…

Le prince n’était pas d’accord. Par ses gestes, j’ai cru comprendre qu’il avait une solution. D’accord, essaie-toi… Il a sorti son couteau. Euh… Je n’ai pas vu ce qu’il a fait, mais il est tombé inconscient. Prince…? Quand il s’est réveillé, il a continué.

J’ai vu une petite boule dans sa main. Il l’a mise dans sa bouche, puis il me l’a donnée. Je dois manger ça? D’accord... Je l’ai donc mâchée et avalée. C’était dégoûtant (un goût de poisson et de sang, ew) et j’ai senti tous mes os se remboîter. Ça a fait atrocement mal et je me suis évanouie.

Quand je me suis réveillée, je pouvais de nouveau bouger, mais j’avais un petit effet secondaire pas du tout remarquable : des écailles sur mes bras et mes jambes et d’après les sensations, j’en avais aussi sur le visage. Et mes oreilles avaient changé aussi. Muuu… Pourquoi j’ai des écailles?

Le prince m’a montré ce qu’il avait fait et j’ai tout de suite arrêté de me plaindre. Ce qu’il avait coupé avec son couteau, c’était un morceau de sa queue. Là où il avait coupé, il y avait un trou. Mais… Mais… Pourquoi tu as fait ça pour moi? Tu me connais à peine…

J’ai eu un moment d’émotion et je l’ai huggé. Tu es devenu mon meilleur ami pour la vie!

-Je suis tellement conne!

-Non!

(Il parle le commun?)

-Oui!

-Non!

-Oui! Je n’arrête pas de me plaindre et de vouloir mourir et toi tu fais ça pour moi!

(Lemleck avait raison. Je suis vraiment stupide et je ne pense qu’à moi. Je suis désolée… Je crois que si mes parents ne me choisissaient pas, je pourrais sans doute l’accepter).

Je me suis accrochée au dos du prince et il s’est mis en route pour le bateau de Lemleck, à peine visible au loin. Je n’étais pas très joyeuse à l’idée d’y retourner, mais où aller d’autre? Nous avons fait quelques arrêts, parce que je me suis étouffée avec l’eau. Arrivés au bateau, il a sauté hors de l’eau jusqu’à ce que nous puissions nous accrocher à l’ancre et il m’a aidée à m’assoir dessus. Après je lui ai fait un dernier câlin et je l’ai embrassé sur la joue. Il a rougi. Adorable. Puis il a dit «tard» et il est reparti. Je crois qu’il voulait dire à plus tard. Oui, à plus tard. J’ai hâte de te revoir.

J’ai caché mes oreilles du mieux que je le pouvais avec mes cheveux et j’ai tiré mes manches pour cacher les écailles sur mes bras. Ensuite, j’ai pris mon courage à deux mains et j’ai crié des «allo» jusqu’à ce que les marins m’entendent et m’envoient une corde pour me remonter à bord.

J’appréhendais leurs réactions et comme de fait, j’ai eu droit à pleins de regards et de «c’est le dieu de la mer qui nous l’a renvoyée pour nous punir»! Non…

J’ai suivi les marins qui allaient avertir Lemleck de mon retour miraculeux, mais j’ai eu peine à y arriver. J’ai commencé à avoir des bouffées de chaleur et ma tête s’est mise à tourner. Tout bouge… Ce n’est pas agréable…

Lemleck avait une attelle à une de ses jambes, mais mis à part ça, il avait toujours autant un caractère de merde. Quand il a vu de quoi j’avais l’air, il a dit que nous allions faire un détour par l’ile de la sorcière pour arranger ça. Je l’ai remercié, mais il m’a dit de ne pas le faire : s’il me remettait à mes parents dans cet état, ils ne seraient peut-être pas aussi coopératifs. Merci quand même, c’est apprécié.

Avant de m’en aller, je lui ai demandé si je pouvais avoir un miroir pour voir de quoi j’avais l’air. Je me suis fait répondre de retourner dans ma cabine. Ma cabine plus de porte? Pas de problème…

J’ai fait demi-tour, mais au bout de quatre pas, les étourdissements et les coups de chaleur ont tellement augmenté que je ne me suis pas sentie capable de continuer. Je suis retournée à la cabine de Lemleck. Je me suis accotée sur le cadre de porte et je lui ai demandé si je pouvais emprunter un petit coin de sa cabine, parce que je ne me sentais pas capable de retourner à la mienne. Ma vue a commencé à être embrouillée tellement tout tournait, alors je n’ai pas attendu sa réponse et je suis entrée.je me suis mise dos au mur et je me suis laissée glisser jusqu’à terre. Sitôt que mes fesses ont touché le plancher, tout est devenu noir…