vendredi 21 octobre 2011

Je ne suis pas sa maîtresse...

20 avril

Quand j’ai commencé à me réveiller, je me suis sentie extrêmement bien, au chaud. Je me suis donc rapprochée de ma source de confort et de chaleur. Je suis bien… Mais c’est quoi ce bruit…? Ça ressemble à… un battement de cœur? J’ai ouvert les yeux et j’ai vu un torse nu, auquel était rattachée la tête de Lemleck. Il avait un bras passé autour de moi et moi (qui était complètement nue à l’exception de ma culotte) j’étais collée contre lui, je me raccrochais même presqu’à lui. Mais qu’est-ce que je fais collée contre lui? Et pourquoi je suis toute nue?

J’étais horriblement gênée alors j’ai tenté une sortie, mais il a resserré son bras contre moi. Je ne pense pas que j’aurais pu être plus rouge. Non seulement il m’avait vue nue pour une deuxième fois, mais en plus, je m’étais collée contre lui! À quoi j’avais pu penser?

J’ai réussi à «m’enfuir» à mon deuxième essai. J’ai repéré mes vêtements et j’ai essayé de m’habiller le plus rapidement et le plus silencieusement possible, ce qui n’a pas été évident étant donné que j’avais encore des étourdissements.

J’ai pu me rendre jusqu’à la porte, mais elle a craqué tellement fort quand je l’ai ouverte, que Lemleck s’est réveillé. Avant qu’il ne décide de me chialer après, je lui ai demandé si je pouvais retourner dans ma cabine. Toujours pas de porte? La cale alors, ça dérangerait? Je pouvais bien faire ce que je voulais, mais je rattrapais la fièvre, il laisserait n’importe lequel de ses marins dormir avec moi. Ça c’était vraiment chien comme argument, mais je suppose que Lemleck était mieux que n’importe qui. Au moins, je savais que lui n’essaierait pas de me tripoter.

Je suis allée sagement m’assoir. Il m’a demandé d’aller lui chercher une bouteille de vin dans l’armoire. Je n’aimais pas quand il était soûl (son caractère était encore plus merdique), mais j’ai jugé plus sage de lui obéir.

Il m’a finalement posé la question que je redoutais : qu’est-ce qui m’étais arrivé. Quand je lui ai raconté qu’une sirène m’avait sauvée, il a eu l’air de croire que j’étais complètement folle. Les sirènes détruisaient les bateaux, alors pourquoi l’une d’entre elles m’aurait sauvée? Est-ce qu’elle m’avait ramenée sur le bateau pour le couler? Pour que je séduise les marins? C’était pour ça que je l’avais collé?

Quoi? Non! J’étais inconsciente! Jamais je ne… Jamais je ne ferais… Jamais je ne ferais… peu importe ce que vous sous-entendez que j’avais en tête de faire! Je n’agis pas comme ça normalement! Je devais être encore plus rouge que lorsque je me suis réveillée. J’espère qu’il ne l’a pas remarqué. Des plans pour que je me fasse accuser de faire semblant d’être gênée pour qu’il me prenne en pitié…

Il m’a dit que si je n’avais pas déliré, il aurait cru que j’avais faké ma fièvre. Mais comment est-ce qu’on peut faké de…? Une minute… J’ai déliré? Oh, oh… Qu’est-ce que j’ai dit? Il m’a répondu que c’était embarrassant, alors j’ai préféré ne pas insister. J’étais très curieuse de savoir ce que j’avais bien pu dire qui était embarrassant, mais je ne tenais pas tant que ça à mourir d’un coup de chaleur.

Et est-ce que je devais vraiment être surprise qu’il me considère encore comme responsable de tout? Alors la tempête aussi est de ma faute? Oui? C’est ça… J’ai prié les dieux pour qu’ils envoient une tempête pour que le bateau coule et que tout le monde, y compris moi-même, meure. Malheureusement, ils ne m’ont écoutée qu’à moitié. Je me demande s’il arrêtera un jour de m’en vouloir. Pourquoi est-ce que je continue d’espérer qu’il change d’avis à mon sujet? Je dois vraiment être complètement folle…

Je lui ai raconté rapidement mes deux rencontres avec le prince. Il pensait déjà que j’étais folle, alors j’ai laissé ça vague : temple de l’eau… gars-sirène super sympathique… Il m’a appris qu’un gars-sirène/sirois s’appelait en fait un triton. Est-ce que c’est moi ou est-ce qu’il vient de s’empêcher de rire…? Je lui ai apporté de la morphine pour qu’il la mélange avec son vin et il a fini par s’endormir.

J’ai déposé la bouteille sur la table de chevet et je suis allée m’assoir à la table. Des légers coups ont été frappés à la porte, comme si on voulait éviter de déranger. Quand j’ai ouvert la porte, le marin qui était derrière s’est caché les yeux avec une main et il m’a demandé si j’étais décente. Euh… Pourquoi je ne le serais pas? Quel genre de réputation les elfes ont-elles sur ce bateau? Rassuré sur ma décence, il a ouvert les yeux et a proposé de m’apporter à manger.

Quand j’ai eu fini de manger, j’ai pris un livre qui s’intitulait «La Dynastie des Elfes Bleus». Lemleck ne les portait pas dans son cœur et j’avais envie de découvrir pourquoi. J’ai lu quelques chapitres quand j’ai entendu Lemleck gémir. Quand je l’ai regardé, j’ai vu qu’il suait à grosses gouttes. J’aurais pu ne pas m’en soucier, mais j’ai été incapable de le laisser souffrir. J’ai réussi à remplir un bol avec mon eau. Je voulais lui éponger le front avec une débarbouillette, mais il a attrapé mon poignet avant que je ne le touche. J’ai tenu à préciser que je n’essayais pas de le tuer. Avec lui, on ne sait jamais. Il serait bien capable de penser que j’essayais de l’étouffer avec la débarbouillette.

Il m’a demandé d’aller chercher un certain Jacques. Jacques était le second à la place de Link et je l’ai trouvé à côté du marin qui tenait la barre. Je l’ai averti de la demande du capitaine. Je crois qu’il avait peur de me laisser seule avec l’autre (un autre qui pense que je complote…), mais le marin me connaissait et il l’a rassuré en lui disant «Mais non, c’est juste Leila»!

Le marin sympathique a commencé à faire des allusions que je ne comprenais pas. Il a dit que j’étais une femme courageuse, parce que le capitaine avait tout un caractère. Oui, il a un caractère de merde, mais quel est le rapport? Comment ça, «moi et le capitaine»? Oh seigneur… Les marins pensent que je suis la maîtresse de Lemleck... C’est pour ça que l’autre marin m’avait demandé si j’étais décente. Mais même si j’étais la maîtresse de Lemleck, pourquoi j’aurais ouvert la porte toute nue? Ça n’avait pas l’air de déranger le marin sympathique que la maîtresse de son capitaine soit une elfe, au contraire. Il a dit qu’il (et c’est le cas de tout le monde je crois) était content que le capitaine soit ouvert à ça. Non, il n’est pas devenu pro-elfe. Je voudrais bien qu’il le devienne ou en tout cas qu’il devienne pro-moi, mais jamais dans ce sens-là…

J’ai essayé de lui dire que je n’étais pas sa maîtresse, mais j’étais tellement embarrassée du malentendu que le marin a dû croire que j’étais seulement gênée d’en parler. Il m’a assurée que ceux qui me connaissaient déjà, avaient fait comprendre aux autres de faire comme si de rien était. Merci de votre discrétion… Il m’a dit de ne pas m’en faire pour les autres marins : dès que je me mettrais à réparer leurs fonds de culottes et leurs chemises… Alors dès que je vais recommencer à jouer à la couturière, leur opinion de la maîtresse de leur capitaine va devenir positive? Wouhou. J’ai hâte de voir la tête de Lemleck quand il le saura. Lemleck, vous savez que tout le monde sur le bateau pense que je suis votre maîtresse? Je ne suis pas certaine d’avoir envie de lui dire : soit c’est moi qu’il va tuer, soit ce sera un (ou plusieurs) marin.

J’ai demandé au marin sympathique s’il restait des caisses de vêtements dans la cale. Pas que je n’avais pas envie de porter les mêmes vêtements jusqu’à notre arrivée à Idraz’ill, mais… Il a donc demandé à un petit matelot qui s’appelait Tim de m’accompagner à la cale, pour que je ne tombe pas. Non, il ne faudrait pas qu’il arrive quoi que ce soit à la maîtresse du capitaine…

Tout ce que Tim et moi avons trouvé ce fut trois petits bouts de tissus. Il a suggéré de m’en faire une jupe, parce que les marins aimeraient ça. Je crois que je préfère encore garder ce que j’ai sur le dos. Tim m’a dit que je n’aurais qu’à les lancer dans le corridor et ils s’en occuperaient. Et moi je reste toute nue en attendant? Je crois que Lemleck va devoir s’habituer à ce que je lui emprunte des chemises et/ou des redingotes...

Jacques est sorti de la cabine quand je suis remontée. Il était blanc comme un drap et il suait. Je me suis tout de suite inquiétée. Je lui ai demandé si tout allait bien, mais il ne m’a pas répondu et il a continué son chemin. J’ai cogné avant de retourner dans la cabine. Devant le pas-de-réponse, je suis entrée. Lemleck dormait et il suait toujours, mais moins.

Je me suis assise à la table et j’ai continué ma lecture, lui jetant de fréquents regards. J’ai senti le bateau qui changeait de direction. Est-ce que nous retournons chez Lemleck?

Au bout de quelques heures, quand je l’ai vu tâtonner à la recherche de quel que chose. J’ai tout de suite su qu’il cherchait la bouteille de vin, alors je la lui ai mise dans les mains et je lui ai soulevé la tête pour l’aider à boire. Il s’est rendormi tout de suite après.

20 au 28 avril

Pendant 8 jours, ma principale occupation a été de m’occuper de Lemleck. Je ne faisais pas grand-chose, mais c’était quand même tout ce que je pouvais faire : le faire boire quand il en avait besoin, lui éponger le front… J’étais habituée de le voir fort, en pleine possession de ses moyens, avec son caractère de merde alors le voir dans un état qui ne lui permettait même pas de me lancer des méchancetés m’inquiétait beaucoup. Ce n’est pas que je tenais à me faire maltraiter. Je voulais seulement qu’il aille mieux.

Quelque chose doit clocher chez moi. Je m’inquiète du sort de l’homme qui m’a prise en otage et je veille même sur lui. Et j’aimerais vraiment pouvoir en faire plus pour l’aider. Mais voilà tout, je suis persuadée qu’il est un homme bien. Est-ce que je vois du bien là où il n’y en a pas ou y en a-t-il vraiment? Je crois qu’il y en a, mais est-ce que j’arriverai un jour à le faire ressortir? Et est-ce que j’arriverai un jour à lui faire voir autre chose en moi que ma partie elfe?

À quelques reprises, je me suis fait jeter dehors pendant que Jacques, Rodrigue et un autre marin entraient. Après leur départ, Lemleck était lavé et les draps changés. Mais l’état de Lemleck ne s’améliorait pas et personne ne me disait jamais rien, alors j’ai fini par me lasser et j’ai pratiquement supplié Rodrigue de me donner une explication. Ma question l’a surprise. Je dormais avec lui, mais je n’avais rien vu? C’est parce que je ne dors pas avec lui… Enfin oui, mais pas comme ça…

Avant de me montrer ce que j’insistais tant pour voir, Rodrigue m’a demandé si j’avais le cœur bien accroché. Ensuite j’ai vu et j’ai failli être malade. La blessure sur la jambe de Lemleck commençait à s’infecter et en plus, les os s’étaient ressoudés dans un angle pas très naturel. Rodrigue a tenu à me rassurer : personne ne m’en voulait. Euh, pourquoi quelqu’un m’en voudrait-il? Qu’est-ce qui s’est passé?

J’ai tellement insisté (j’étais même sur le point de le menacer de le frapper s’il ne me disait pas la vérité) que Rodrigue m’a tout dit : quand j’étais tombée à l’eau, Lemleck avait tenté de me secourir. Il s’est blessé pour me sauver? Oh mon dieu… Il avait raison… Tout est de ma faute… Il est peut-être en train de mourir à cause de moi… Pourquoi avez-vous fait quelque chose comme ça pour moi? Idiot! Pourquoi? Pourquoi? J’étais tellement hors de moi que je l’aurais frappé s’il n’avait pas été inconscient. Maintenant j’ai une raison de plus de vouloir le sauver.

Le 28 au matin, nous sommes arrivés à l’ile aux dragons. Jacques et quelques autres marins sont descendus pour chercher une plante aux vertus miraculeuses : la plante du dragon. Rodrigue a été promu au rang de second et il a reçu pour instructions de lever l’ancre s’ils ne revenaient au bout de quelques heures.

Quelques heures plus tard, il n’y avait toujours aucun signe de vie, mais Rodrigue ne voulait pas partir. Il y avait un marin sur le pont qui était d’un autre avis. Je ne pouvais pas lui en vouloir d’avoir peur, mais je pouvais lui en vouloir de toutes les niaiseries qu’il disait : Il faut partir! Ils sont sans doute morts! Il faudrait partir! J’ai fini par en avoir assez et je l’ai giflé. Espèce d’idiot! Tu penses vraiment que ça aide? Nous avons besoin de la plante et nous ne pouvons pas nous permettre de repartir pour une ville où il y aurait un chirurgien! Si tu n’arrêtes pas, je vais finir par t’assommer!

Rodrigue a éclaté de rire. Quoi? Jamais il n’aurait imaginé qu’une elfe puisse avoir un esprit de pirate. Vouloir assommer des gens qui nous exaspèrent c’est avoir un esprit de pirate? J’en ai un depuis longtemps alors… Il m’a dit qu’il comprenait pourquoi je plaisais au capitaine. Non, je ne lui plais pas… Et je ne suis pas sa maîtresse… Quand l’idiot a recommencé à paniquer, je suis allée vers lui, bien décidée à lui en coller une autre. Il a réussi à m’arrêter, mais je me suis vengée en lui donnant un bon coup de pied dans le tibia. J’ai eu droit à quelques insultes et nous avons été séparés avant que le deuxième coup de pied n’arrive. Rodrigue a ordonné qu’il soit enfermé dans la cale.

Moi j’étais plus que prête à aller sur l’île, mais pas sans arme. Je voulais avoir un minimum de chance de m’en sortir. Rodrigue m’a donné une grosse dague et aussi (et surtout) un petit pistolet à deux coups qui appartenait à Lemleck. Selon lui, Lemleck aurait voulu que je l’ais, pour me porter chance. Non, je ne crois pas et s’il apprend un jour que je l’ai eu en ma possession, il pensera que je l’ai volé. Trois braves marins ont finalement accepté de m’accompagner.

Sur l’ile, j’ai commencé à entendre des voix. Il y en avait une qui disait qu’elle voulait les têtes en premier. Euh, il y a des trucs sur cette ile qui, non seulement parlent, mais qui parlent de manger nos têtes. Restons sur nos gardes… Un peu après, nous avons tous entendu une petite fille crier. J’étais certaine que c’était un piège, mais juste au cas où, nous nous sommes approchés.

Vous vous souvenez à quel point je suis bonne pour me mêler de ce qui ne me regarde pas? Bien c’est ça… La petite fille essayait d’échapper à un petit dragon alors nous (au moins je n’ai pas été seule cette fois) avons décidé de l’aider. Mais la petite fille était aussi un dragon et les deux n’ont pas été très contents que nous les dérangions.

J’ai fini par perdre les marins de vue, étant occupée à essayer de ne pas me faire péter la gueule, ce qui est quand même arrivé. Je me suis retrouvée dans la gueule de la petite fille. Ow, mais heureusement pour moi, je n’étais pas de son goût. Je sentais (et goûtais aussi je crois) le poisson. Je leur ai causé beaucoup d’étonnement, parce que j’avais des pouvoirs, mais surtout parce que je parlais. Alors votre nourriture ne parle pas normalement? Est-ce que j’ai vraiment envie de savoir pourquoi?

Comme si deux enfants dragons n’étaient pas assez, il a fallu que le père de un et la mère de l’autre arrivent. Je vais tellement mourir…

Eux aussi trouvaient que je sentais le poisson. Et ils se sont dit que si rien d’autre ne fonctionnait, donner l’elfe étrange à manger à leur mère malade serait une bonne idée. Muuu… Je vais me faire dévorer par un dragon…

Encore une fois, je me suis laissé avoir par un argument de poids. L’homme m’a dit qu’il ne pouvait pas me manger, mais qu’il pourrait me briser en deux si je n’étais pas sage. Je vais être très, très sage, promis! Il s’est transformé en dragon et il m’a agrippé par le collet avant de s’envoler. Je ne sais pas ce qui est arrivé aux marins qui m’accompagnaient…

Arrivée chez eux, j’ai appris que leur père était en train de discuter (Discuter en dragon, c’est rugir?) avec des humains. J’espérais de tout mon cœur qu’il s’agisse de Jacques et des autres marins. J’aurais bien voulu aller parler au chef de clan, mais j’ai été confiée aux bons soins des deux enfants. Ma surveillance n’a pas duré longtemps. Ils ont entendu un gros rugissement et ils ont décidé d’aller jeter un coup d’œil. Quant à moi, ils ont décidé d’aller m’enfermer avec «lui», peu importe de qui il s’agissait. Ils ont écrit quelque chose sur un écriteau qu’ils ont passé autour de mon cou et ils m’ont emmenée jusqu’à une grande porte, à côté de laquelle il y avait une petite trappe. J’ai bien essayé de résister, mais un pas-de-force d’elfe ne fait pas le poids contre deux dragons, même enfants.

Ils m’ont fait passer de l’autre côté de la trappe et ils sont partis. J’ai commencé à entendre du bruit. Muuu… Je vais me faire dévorer par un dragon… J’ai placé mon écriteau bien en évidence devant moi et j’ai supplié peu importe ce qu’il y avait dans l’ombre de ne pas me manger. Je savais que je sonnais très désespérée, mais au diable la fierté quand c’est ma vie qui est en jeu.

L’homme que j’ai vu apparaître était en fait plutôt sympathique. Il m’a assuré qu’il n’allait pas me manger. Je restais méfiante, mais il m’a posé une excellente question, qui m’a détendue un peu : si je m’apercevais que ma salade pouvait parler, est-ce que je continuerais à en manger? Ok, vu comme ça… Son goût à lui était plutôt les gâteaux. C’est pour ça qu’il était enfermé? Parce qu’il était différent…?

Je lui ai parlé de ce que moi et mes compagnons étions venus chercher ici. Il m’a dit que la plante n’était pas suffisante. Mais nous n’avons rien d’autre… Lucky me, plus loin dans sa «cellule», il y avait un tas d’artefacts (mon nouvel ami en était un collectionneur). Nous avons cherché quelque chose qui pourrait aider Lemleck et nous avons trouvé une botte (qui faisait guérir plus vite) et un bracer (qui créait une aura de guérison).

Sans rien exiger en retour, il me les a donnés, en signe de bonne foi. Il m’a seulement demandé de penser à lui quand je partirais. Moi je n’avais aucune intention de partir sans les marins, mais il m’a dit qu’il nous aiderait, moi et mes compagnons, à sortir d’ici. Le seul hic, c’était que nous allions devoir mettre son père (et son frère et sa sœur) hors d’état de nuire. Il m’a donné une petite fiole : une goutte dans la théière et ils s’endormiraient. C’était sans doute ma seule chance.

Après j’ai pris le thé avec lui. Ce n’était pas un thé raffiné comme ceux auxquels j’étais habituée. Il l’avait fabriqué lui-même. Le goût était plutôt… spécial, mais il avait tellement l’air motivé à me le faire goûter que je lui ai dit qu’il était bon. Ça a eu l’air de lui faire encore plus plaisir.


Soupir…


Est-ce que je suis sérieusement en train de penser à faire un pacte avec un dragon…?

dimanche 16 octobre 2011

Le prince Gnuhanhanhan est mon nouveau meilleur ami pour la vie

12 avril

Quand le jardinier est arrivé, il m’a carrément ignorée. J’ai fini par avoir son attention quand je suis allée me planter devant lui et qu’il n’a eu d’autre choix que de s’arrêter. Je lui ai demandé si je pouvais l’aider et tout de suite il a pensé que je voulais tuer les plantes ou trouver des plantes pour tuer quelqu’un. Non, je veux vraiment seulement aider…

Une servante est passée et lui a dit qu’il devrait me laisser faire et que les plates-bandes à l’arrière avaient besoin d’être désherbées. Est-ce que je vois du travail en perspective…? Pendant que le jardinier réfléchissait, je lui ai mentionné que je n’avais pas peur de me salir les mains ni de travailler fort. Il a fini par accepter. Oh ouais! Je vais pouvoir aider! Je vais pouvoir… désherber ces trois plates-bandes pleines de ronces… avec pour seuls outils mes deux mains… Est-ce que c’est moi ou est-ce que je ne viens pas de me faire avoir?

Je devais en effet tout arracher à mains nues, sans gants ni instruments. Quand j’aurais fait un tas assez gros, je devais l’apporter au jardinier. J’ai passé toute la journée, jusqu’à l’heure du souper, à me faire saigner les mains et les bras, à enlever les ronces d’une moitié de plate-bande. C’était douloureux et pas du tout agréable, mais je ne voulais pas abandonner. Jamais je ne donnerais au jardinier la satisfaction de me voir me plaindre.

À la fin de ma journée, je suis allée faire mon rapport au jardinier et je suis partie en lui disant bonjour et en le remerciant. Il m’a regardée bizarrement. Quoi? C’est si étrange que ça que je sois aimable avec vous?

Dans ma chambre, j’avais commencé à nettoyer mes blessures quand Sophie est venue me porter mon souper. Quand elle a vu mes bras, j’ai dû lui donner comme excuse bidon que je n’étais pas très douée avec les plantes. Elle m’a dit qu’elle m’apporterait une pommade. C’est finalement Maggie qui me l’a apportée et j’ai dû répéter que je n’étais pas très bonne avec les plantes.

Elle m’a demandé si j’avais eu l’occasion de le croiser. Euh, non et j’espère que ça n’arrivera pas. Elle m’a répondu que je ne pouvais pas rester ici des années sans lui parler. Et qu’est-ce que je pourrais lui dire? Bonjour! Vous me détestez, moi aussi, mais comment ça va? Elle a suggéré de rester dans la même pièce, même sans rien dire, que ça serait bien. Des plans pour qu’il pense que je complote je ne sais pas quoi en l’espionnant. De toute façon, je n’ai pas l’intention de rester ici des années. Oui, je sais, le seul moyen de partir c’est d’avoir Lemleck de mon côté. Et je sais aussi que sneaker sur le bateau n’est pas une option. Mais qu’est-ce que vous suggérez? Bonjour! Vous me détestez, moi aussi, mais laissez-moi partir s’il vous plaît? Je vois ça d’ici…

Maggie m’a reparlé de mon insomnie. Ah oui… C’est sans doute à cause du fantôme qui n’arrête pas de me déranger pour que j’aille dans l’aile ouest. Je veux dire, oui, vous avez raison, je ne dors pas très bien ces jours-ci. Elle m’a donc apporté une tisane relaxante et pour la première fois depuis des jours, j’ai bien dormi.

13 avril

J’ai travaillé sur les plates-bandes jusqu’à l’heure du souper. J’ai terminé la première plate-bande et j’ai commencé la deuxième. J’allais faire mon rapport au jardinier quand j’ai vu le carrosse de l’elfe arriver. J’ai préféré attendre qu’elle entre avant d’y aller. J’ai encore remercié le jardinier et je lui ai souhaité une bonne fin de journée. Je l’ai entendu murmurer que les elfes étaient masochistes. Quoi? Non, je veux juste vous prouver que je peux travailler fort.

Quand je suis entrée, j’ai vu Lemleck descendre les escaliers. J’ai aussitôt fait demi-tour et je suis retournée travailler dans mes plates-bandes cinq-dix minutes, en espérant que ça serait suffisant pour qu’il soit parti. Éviter une confrontation… ♫

Quand je suis retournée jeter un coup d’œil, il n’était plus là. Je me suis donc dépêchée de courir jusqu’à ma chambre avant de risquer de retomber sur lui. J’ai eu droit à la visite surprise de Maggie, qui était super motivée pour manger avec moi. Ça m’a fait plaisir, parce que je n’avais pas souvent l’occasion d’avoir de la compagnie. Elle m’a dit que je pouvais venir manger avec elle si je le voulais. Dans la cuisine? Bonjour madame la cuisinière qui me déteste! Je viens envahir votre domaine le temps d’un repas! Euh, non, je ne crois pas. Maggie a suggéré d’installer une table dans le hall d’entrée. Pas très discret. Et puis, je me ferais sans doute accuser d’espionner les allées et venues de tout le monde.

Maggie n’aimait pas trop l’elfe et c’est pour ça qu’elle était venue me voir. J’ai fini par lui mentionner que j’avais déjà parlé à l’elfe. À voir son regard, je ne suis pas certaine que ça ait été une bonne chose. Elle m’a dit que l’elfe ne faisait rien pour rien. Oups. Je m’excuse? J’avais confiance en Maggie alors je lui ai répété ce que j’avais révélé à l’elfe. Elle a décidé d’en parler à Lemleck, mais m’a promis que ça ne se retournerait pas contre moi. Après le sujet de l’elfe, nous avons parlé de tout et de rien. Elle m’a mentionné qu’elle ne pouvait plus accomplir sa fonction et qu’elle avait été reconvertie en gouvernante de la maison. Je me demande si c’était elle la gouvernante des enfants…

14 avril

Vers 1 heure du matin, j’ai été réveillée en sursaut par ma porte qui s’est ouverte en grand. C’était Lemleck, qui était, oh surprise, complètement soûl. Il avait aussi l’air très fâché. Oh, oh… Qu’est-ce que j’ai fait encore? Il a exigé de savoir mon nom. Oh non… J’ai fait l’erreur d’hésiter et ça l’a mis plus en colère. Il s’est approché et a mis ses mains sur le lit, de chaque côté de moi. Il a encore exigé de connaître mon nom. J’avais vraiment peur qu’il ne me tue si je ne lui répondais pas alors j’ai fini par lui dire.

-Wind…

-Ton rang!

-… Mon père est marquis.

Il m’a dit qu’il espérait que ce ne soit pas un mensonge. La menace était très claire. Mais comment pouvait-il penser que je sois assez stupide pour mentir? Apparemment, en plus d’être des meurtriers sanguinaires, les elfes étaient aussi tous des menteurs. Euh, non! J’avais beaucoup trop peur pour penser à mentir!

Lemleck m’a saluée en partant, comme si j’étais quelqu’un d’important. Étrange… Et c’était si difficile que ça de fermer la porte en sortant?! Après l’avoir fait à sa place, je me suis rassise dans mon lit, les couvertures remontées jusqu’à mon nez. J’avais peur que Lemleck ne revienne et avec tous les murmures que j’entendais dans le corridor, j’aurais été incapable de dormir de toute façon.

Ce qui fut parfait, parce que c’est exactement ce moment-là qu’a choisi mon ami le fantôme pour me rendre une autre visite. Je lui ai dit plusieurs fois que je ne pouvais pas sortir parce qu’il y avait trop de gens éveillés, mais je crois qu’il n’a pas compris.

Ensuite les mêmes choses ont recommencé : meubles déplacés, flèche dans la buée qui pointait vers la chaise… J’ai eu beau lui répéter que je ne pouvais pas sortir, il n’est pas parti. Mais je veux dormir moi…

Au début, il ne m’a pas laissée déplacer la chaise. Il a fait des traces en alternance sur le lit. Et quand j’ai finalement pu m’assoir sur la chaise, il l’a balancée d’en avant à en arrière. Une chaise berçante? Est-ce que ça a un rapport avec une chaise berçante? Je ne demande qu’à vérifier, mais pas cette nuit!

Le fantôme a déposé la clé sur la vanité. Pas ce soir, merde! Il a commencé à écrire dans le miroir. H… E… L… J’ai complété avec un «P». D’accord. Help. Mais aider qui ou quoi? En-dessous de «help», il a écrit autre chose. L… A… un «c» ortho? Une barre verticale qu’il a rushée à faire… J’ai essayé différentes combinaisons pour le «c» ortho, mais il les a effacées à chaque fois.

Finalement, j’en ai eu assez. Le soleil se levait et j’étais fatiguée. J’ai replacé les meubles du mieux que je le pouvais et je me suis couchée. Dodo…

Ma tête venait à peine de toucher l’oreiller quand Maggie est entrée. Elle était plutôt agitée. Elle m’a demandé ce qui s’était passé. Le fantôme a encore foutu le bordel dans ma chambre. Je veux dire… J’ai fait un peu de réaménagement dans ma chambre, c’est tout… Ce n’est pas à ça qu’elle faisait référence : Lemleck se préparait à partir pour Idrazz’il. Oups. Je lui ai peut-être dit mon nom et mon rang… Pourquoi est-ce que j’ai l’impression qu’il ne va pas me ramener chez moi juste pour me ramener chez moi?

Maggie est partie me gagner du temps pour que je puisse me préparer. Je me suis habillée et je suis allée chercher mon sac dans le grenier et je l’ai rempli d’autres vêtements… et de la petite clé que le fantôme a encore fait tomber à côté de moi.

Je suis descendue dans le hall d’entrée. Il y avait Maggie, Link et Lemleck, qui m’a encore saluée comme si j’étais importante. Je suis perturbée. Je crois que je préférais encore quand il me traitait comme de la merde. Au moins tout était clair.

Le départ était immédiat. Malheureusement pour moi, Link ne serait pas du voyage. Il aurait voulu, mais Lemleck lui a dit non. Muuu… Mon seul ami sur le bateau ne sera pas là…

Le trajet en tête-à-tête avec mon capitaine préféré a duré une journée et demi. Dans sa grande gentillesse, il a partagé son vin avec moi. Louche… Il m’a aussi expliqué pourquoi nous allions à Idrazz’il. Il avait l’intention de me redonner à mes parents si ces derniers organisaient une grande réception où seraient présents certains membres de la cour.

Ok… Alors vous me «demandez mon aide» pour assassiner des membres de la cour royale elfique? Je ne suis pas certaine d’être d’accord. Ça me rend profondément mal à l’aise d’être impliquée là-dedans, mais en même temps… Si les circonstances étaient différentes (genre que je n’étais pas retenue en otage) et que j’avais un peu plus d’explications, j’aurais envie de l’aider. Peu importe ce qui a pu se passer, personne ne mérite de perdre sa famille de cette façon.

Lemleck m’a encore fait assez peur pour que je lui raconte ce que je savais sur mes parents. J’aimerais être plus forte, mais si je ne fais pas ce qu’il veut quand il est dans cet état, je suis certaine qu’il va ma tabasser. Il m’a demandé s’ils étaient loyaux. Je crois que oui… Il m’a aussi demandé si je croyais qu’ils me choisiraient. Je l’espère. Il m’a sorti une remarque comme quoi j’avais bien une attitude d’elfe, à penser à ma petite personne sans me soucier de qui allait mourir à ma place, la joie au cœur. Ok. Dite comme ça, je n’ai plus autant la joie au cœur. Et je ne suis plus certaine d’avoir envie que mes parents me choisissent…

Il m’a mise en garde. Si jamais j’avais menti… Il n’éprouvait aucun plaisir à torturer les gens faibles, mais… J’aurais bien voulu répliquer quelque chose, mais il avait raison au moins sur ce point : j’étais faible. J’ai dû lui répéter : Je n’ai pas menti! Je suis incapable de mentir! Je sais bien que j’étais paralysée par la peur ce matin et tout à l’heure aussi, mais je suis vraiment incapable de mentir! Quand je lui ai dit que je n’avais jamais pensé à l’attaquer dans le dos, il m’a répondu : Tu vois? Tu sais mentir. Non! J’ai beau être fâchée contre vous la plupart du temps (ça et le fait que je n’approuve pas vos méthodes), je n’ai jamais pensé à vous backstabber! J’ai eu droit à une maigre consolation : il m’a donné sa parole qu’il n’arriverait rien ni à moi ni à mes parents si nous respections notre part du marché. Yééé, c’est fou ce que je me sens rassurée… Et si mes parents ne me choisissaient pas? Qu’est-ce qui va m’arriver…?

15 avril

En soirée, nous sommes arrivés au port. Lemleck a fait une face : l’elfe était là. Elle a essayé de le convaincre de la laisser nous accompagner, me demandant silencieusement de l’aide du regard. Je n’ai rien dit. Je ne pensais pas que ça soit une bonne idée de prendre sa défense devant lui. Et en plus, elle avait l’air de lui faire des yeux doux. Euh… Et quand elle a osé se comparer à lui, j’ai tout de suite su que je ne devais pas m’en mêler et j’avais raison. Lemleck n’a pas été content du tout. Il lui a interdit de se comparer à lui. Il lui a dit qu’il n’avait pas besoin de son aide et il l’a traitée de putain royale. Il n’en fallait pas plus pour que l’elfe devienne rouge tomate et parte.

Après, Lemleck ma carrément ignorée et je suis retournée dans mon ancienne cabine. J’ai eu droit à des regards des marins qui ne me connaissaient pas et à des salutations chaleureuses de ceux qui me connaissaient. Comme je n’avais rien à faire à part me morfondre sur mon sort, j’ai repris avec joie (mais secrètement) mon rôle de couturière.

19 avril

Ce matin-là, le soleil ne s’est pas vraiment levé. Le temps était sombre et la mer de plus en plus agitée. J’ai jeté un coup d’œil dehors et quand j’ai vu des marins commencer à s’attacher, j’ai décidé de faire la même chose. M’attacher au bureau avec mes beaux draps super solides ne pouvait être qu’une excellente idée qui ne risquait certainement pas de mal se terminer, alors je me suis lancée.

Le bateau tanguait de plus en plus : tout ce qui n’était pas attaché se déplaçait. Par moment, je ne voyais que de l’eau par le hublot, mais la vitre tenait bon. J’étais relativement en sécurité, mais il a fallu, encore une fois, que je me mêle de ce qui ne me regardait pas. J’ai entendu un cri dehors et au lieu de me dire, comme toute personne sensée «il y a une grosse tempête dehors, je vais rester en sécurité dans ma cabine», j’ai préféré me dire «Il y a peut-être une personne en danger! Allons ouvrir la porte»!

Je n’ai même pas eu le temps de regarder que ma porte se faisait arracher par une vague et que je buvais la tasse. Super. Ça c’était à peu près aussi génial comme idée que de chanter pour aider les gentils pirates contre les méchants pirates. Ma «corde» tenait encore, mais à peine. Ok. Il faut que j’aille me cacher dans un endroit plus sécuritaire. Allons affronter la tempête! Mais avant je prends mon sac et… Mon sac... Où est mon sac? Merde! J’ai encore perdu toutes mes affaires!

J’avais le choix entre la cabine de Lemleck et la cale. J’ai choisi la première option, au risque de me faire revirer de bord. J’ai réussi à marcher trente secondes et je me suis fait emporter par une vague. J’ai senti (et surtout entendu) tous mes os se briser et je suis passée par-dessus bord. J’ai eu la vague impression que quelqu’un maintenait ma tête hors de l’eau et tout est devenu noir.

Je me suis réveillée sur un rocher. Je n’avais plus mal, à part au cou. En tournant la tête, j’ai vu des cheveux bleus sur ma poitrine. Euh, qui est là? J’ai entendu un son et j’ai tout de suite compris. C’était le prince Gnuhanhanhan! Mais qu’est-ce que tu fais ici? C’était lui qui m’avait sauvée, mais j’avais toujours un petit problème : je ne pouvais plus bouger ni mes bras ni mes jambes. Muuu… Je suis paraplégique… Tuez-moi quelqu’un! Muuu…

Le prince n’était pas d’accord. Par ses gestes, j’ai cru comprendre qu’il avait une solution. D’accord, essaie-toi… Il a sorti son couteau. Euh… Je n’ai pas vu ce qu’il a fait, mais il est tombé inconscient. Prince…? Quand il s’est réveillé, il a continué.

J’ai vu une petite boule dans sa main. Il l’a mise dans sa bouche, puis il me l’a donnée. Je dois manger ça? D’accord... Je l’ai donc mâchée et avalée. C’était dégoûtant (un goût de poisson et de sang, ew) et j’ai senti tous mes os se remboîter. Ça a fait atrocement mal et je me suis évanouie.

Quand je me suis réveillée, je pouvais de nouveau bouger, mais j’avais un petit effet secondaire pas du tout remarquable : des écailles sur mes bras et mes jambes et d’après les sensations, j’en avais aussi sur le visage. Et mes oreilles avaient changé aussi. Muuu… Pourquoi j’ai des écailles?

Le prince m’a montré ce qu’il avait fait et j’ai tout de suite arrêté de me plaindre. Ce qu’il avait coupé avec son couteau, c’était un morceau de sa queue. Là où il avait coupé, il y avait un trou. Mais… Mais… Pourquoi tu as fait ça pour moi? Tu me connais à peine…

J’ai eu un moment d’émotion et je l’ai huggé. Tu es devenu mon meilleur ami pour la vie!

-Je suis tellement conne!

-Non!

(Il parle le commun?)

-Oui!

-Non!

-Oui! Je n’arrête pas de me plaindre et de vouloir mourir et toi tu fais ça pour moi!

(Lemleck avait raison. Je suis vraiment stupide et je ne pense qu’à moi. Je suis désolée… Je crois que si mes parents ne me choisissaient pas, je pourrais sans doute l’accepter).

Je me suis accrochée au dos du prince et il s’est mis en route pour le bateau de Lemleck, à peine visible au loin. Je n’étais pas très joyeuse à l’idée d’y retourner, mais où aller d’autre? Nous avons fait quelques arrêts, parce que je me suis étouffée avec l’eau. Arrivés au bateau, il a sauté hors de l’eau jusqu’à ce que nous puissions nous accrocher à l’ancre et il m’a aidée à m’assoir dessus. Après je lui ai fait un dernier câlin et je l’ai embrassé sur la joue. Il a rougi. Adorable. Puis il a dit «tard» et il est reparti. Je crois qu’il voulait dire à plus tard. Oui, à plus tard. J’ai hâte de te revoir.

J’ai caché mes oreilles du mieux que je le pouvais avec mes cheveux et j’ai tiré mes manches pour cacher les écailles sur mes bras. Ensuite, j’ai pris mon courage à deux mains et j’ai crié des «allo» jusqu’à ce que les marins m’entendent et m’envoient une corde pour me remonter à bord.

J’appréhendais leurs réactions et comme de fait, j’ai eu droit à pleins de regards et de «c’est le dieu de la mer qui nous l’a renvoyée pour nous punir»! Non…

J’ai suivi les marins qui allaient avertir Lemleck de mon retour miraculeux, mais j’ai eu peine à y arriver. J’ai commencé à avoir des bouffées de chaleur et ma tête s’est mise à tourner. Tout bouge… Ce n’est pas agréable…

Lemleck avait une attelle à une de ses jambes, mais mis à part ça, il avait toujours autant un caractère de merde. Quand il a vu de quoi j’avais l’air, il a dit que nous allions faire un détour par l’ile de la sorcière pour arranger ça. Je l’ai remercié, mais il m’a dit de ne pas le faire : s’il me remettait à mes parents dans cet état, ils ne seraient peut-être pas aussi coopératifs. Merci quand même, c’est apprécié.

Avant de m’en aller, je lui ai demandé si je pouvais avoir un miroir pour voir de quoi j’avais l’air. Je me suis fait répondre de retourner dans ma cabine. Ma cabine plus de porte? Pas de problème…

J’ai fait demi-tour, mais au bout de quatre pas, les étourdissements et les coups de chaleur ont tellement augmenté que je ne me suis pas sentie capable de continuer. Je suis retournée à la cabine de Lemleck. Je me suis accotée sur le cadre de porte et je lui ai demandé si je pouvais emprunter un petit coin de sa cabine, parce que je ne me sentais pas capable de retourner à la mienne. Ma vue a commencé à être embrouillée tellement tout tournait, alors je n’ai pas attendu sa réponse et je suis entrée.je me suis mise dos au mur et je me suis laissée glisser jusqu’à terre. Sitôt que mes fesses ont touché le plancher, tout est devenu noir…

mardi 11 octobre 2011

Moi aussi je détesterais les elfes

7 au 11 avril

La forme humaine a fini par disparaître de la vapeur. Je me suis dépêchée de m’essuyer et de mettre ma chemise de nuit. J’aurais bien voulu me cacher sous mes couvertures et y rester jusqu’à ce que mort s’ensuive, mais Maggie est revenue avec mon souper.

Dieu merci, elle n’avait pas été parler à Lemleck. Je lui ai donc demandé de ne pas le faire. Je ne suis pas certaine qu’elle ait compris mes raisons. Ça ne servira à rien, c’est tout. Lemleck va encore penser que je complote je ne sais pas quoi. Je vais encore me faire demander : C’est quoi ton plan? Je n’ai pas de plan! Je n’en ai jamais eu!

Et puis, pourquoi je voudrais sortir de ma chambre de toute façon? Pour me faire encore accuser d’être allée dans un endroit où je n’étais pas censée aller, mais où je ne savais pas que je n’avais pas le droit d’aller? Comme pour le jardin… Non Maggie, je me rappelle qu’il n’y a pas de jardin. Il n’y a plus de violon non plus… Maggie m’a dit de ne pas m’en faire : peut-être qu’à son prochain voyage, Lemleck pourrait m’en rapporter un? Et pourquoi je voudrais qu’il m’en donne un autre? Pour qu’il le détruise encore? Je préférais encore m’en passer…

Quand finalement je me suis couchée, j’ai été loin d’avoir la paix. Mon nouvel ami est revenu me tenir compagnie et cette fois-ci, il avait l’air décidé à m’empêcher de dormir. J’ai eu droit à tant de gentillesse de sa part : clés qu’il n’arrêtait pas de faire tomber, meubles déplacés, flèche tracée sur le miroir (mais elle veut dire quoi ta maudite flèche?), cheveux tirés vers le haut…

Je ne dormais presque plus. Et un des matins, je n’ai pas réussi à replacer les meubles avant que Maggie ne vienne me porter mon petit déjeuner. Elle a pensé que j’avais passé ma frustration dans le déplaçage. J’ai essayé de lui dire que ce n’était pas moi, mais je crois qu’elle ne m’a pas crue. D’accord, si vous voulez le penser. Moi et mon pas-de-force nous avons réussi à faire tourner la baignoire sur le côté. Dieu merci, j’ai eu assez d’intelligence pour ne pas lui parler du fantôme.

Finalement, au bout de quatre j’ai fini par céder. Avant de devenir complètement folle, je préférais encore aller dans l’aile ouest et me faire tuer. Donc, dans la nuit du 11 au 12 avril, je suis allée m’aventurer dans l’aile ouest toute seule comme une conne. J’ai eu horriblement peur, mais j’ai réussi à entrer sans me faire prendre.

Je suis encore sous le choc de ce que j’ai trouvé. Tout était abandonné depuis longtemps, mais l’horreur de tout ce qui y était passé était très visible. Sous les couches de poussière, je voyais les meubles brisés, toutes les flèches et le sang… Tout était séché depuis longtemps, mais quand j’ai vu l’énorme tache de sang dans la chambre d’enfant, j’ai failli être malade. Ils ont tué des enfants? Quel genre de monstres…?

À l’étage, j’ai trouvé une chambre complètement rouge, comme si tout avait été tapissé de sang. Il ne s’agissait pas juste d’une tuerie, mais carrément d’une boucherie. Si c’était des elfes qui avaient fait tout ça, ça me rendait vraiment honteuse d’en être une.

D’une fenêtre, j’ai pu apercevoir le jardin où j’avais osé m’aventurer, avec une belle vue sur la croix. Je ne sais pas pourquoi, mais je me suis dit que ça devait forcément avoir un rapport avec ce qui s’était passé dans la maison. Je comprends que Lemleck n’ait pas été content que je m’y sois aventurée. Je n’approuve pas la destruction de mon violon, mais je comprends un peu plus.

Je suis sortie de là avec deux journaux intimes qui avaient appartenus aux filles de Lemleck, Sophia et Fei. Il avait aussi deux fils : Charles et Gregory. J’ai passé le restant de la nuit à lire les deux journaux. De ce que j’ai compris, Lemleck s’était retrouvé responsable d’elfes assez importants. Deux enfants avaient disparu. Le petit garçon avait été retrouvé, mais pas le bébé. Lemleck a été convoqué. Je ne sais pas ce qui s’est passé, mais il n’a plus jamais été comme avant, ses yeux étaient devenus tristes. Il y a aussi eu beaucoup de membres de sa famille qui sont tombés malades (certains sont morts), dont Tibalt, qui aurait même pleuré (malade #2 aurait aussi pleuré).j’étais prête à éprouver toute la compassion du monde pour Lemleck, mais pour son frère, jamais.

Toute la famille a été déportée, à l’exception d’Hélène, qui était je crois la petite amie de Gregory. Tibalt avait réussi à trouver beaucoup d’argent pour que Lemleck puisse s’acheter une grande maison le plus éloigné possible du port, parce que c’était un endroit très dangereux. La femme de Lemleck voulait une très grande maison, parce qu’elle attendait un autre enfant.

Il a été fait mention d’une gouvernante que Lemleck était parti chercher et qui était comme eux (??). Et aussi le fait qu’ils ne pouvaient plus prendre leurs marches comme avant, qu’ils marchaient maintenant comme des elfes. En quoi la marche est-elle différente d’une race à l’autre?

La jeune Fei a parlé d’un monsieur louche (elfe?) qui rôdait. Son père et Gregory étaient bizarres et se sont disputés. Sophia a aussi parlé du monsieur louche (et aussi du fait que les elfes étaient méchants). Elle avait peur, mais Gregory ne voulait rien lui dire.

Donc, ce que je peux conclure de la situation, c’est que sous la responsabilité de Lemleck le bébé d’elfes importants a disparu, Lemleck a été puni, tout la famille a été déportée à Scion et tout le monde s’est fait tuer par des elfes (ou à cause d’elfes). Alors c’est pour ça qu’il déteste les elfes? Sa femme enceinte et ses quatre enfants ont été massacrés? Moi aussi j’haïrais les elfes. En ce moment, j’ai vraiment honte d’en être une…Je ne comprends pas pourquoi il ne m’a pas jetée par-dessus bord au début. Mais surtout, je ne comprends pas comment il a fait pour continuer après avoir tout perdu…

12 avril

Quand je me suis levée, après trop peu d’heures de sommeil, je me suis décidée à dire à Maggie qu’elle pouvait parler à Lemleck, parce que je n’osais pas le faire moi-même. J’étais plus décidée que jamais à recommencer mon opération ami-ami, mais pour ça, je devais sortir d’ici.

Maggie est partie et j’ai fini par entendre des cris et des bruits de choses qui se brisaient. Mais quand Maggie est revenue me voir, elle m’a dit que j’avais maintenant le droit de sortir de ma chambre. Quand j’ai dit que j’allais recommencer à demander à tout le monde si je pouvais les aider, elle m’a répondu que ce n’était pas à moi de faire leur travail et elle m’a suggéré d’aller aider le jardinier. Je suis donc allée l’attendre à côté à côté de ses plates-bandes. Cette fois-ci, je ne partirai pas avant qu’il ait accepté de me laisser l’aider…

samedi 1 octobre 2011

Humeur de Leila

Parce que je suis en vacances et que je n'avais rien de mieux à faire.^^