dimanche 8 janvier 2012

Euh...

Lemleck attendait sans rien dire devant moi. Il me regardait et attendait­. Je lui ai demandé pourquoi il voulait tant savoir. C'était raisonnable comme question, non? Après tout, ça faisait six mois que je voyageais avec lui et jamais il ne s'était intéressé à ce qui s'était passé. Malgré ça, il a refusé de me répondre.


J'ai commencé par parler d'Urh. Je crois que j'ai dit dix mots avant d'avoir un blocage.
-Est-ce que c'est vraiment nécessaire?
-...
Encore un silence. Lemleck ne m'aiderait pas du tout. Je me serais attendue à ce qu'il le fasse. Pas avec des encouragements, mais avec des «Parle l'elfe!». Le silence était pire.

J'ai réussi à me rendre jusqu'à l'arrivée à la maison. Ensuite, j'ai encore bloqué. Le souvenir de cette fameuse nuit me rendait profondément mal à l'aise. J'aurais pu à ce moment-là me taire. Je lui ai encore demandé si c'était vraiment nécessaire et il m'a répondu que si je ne voulais pas en parler, c'était mon choix.

J'aurais pu tout arrêter à ce moment-là et ne plus jamais y penser, mais j'ai choisi de tout déballer. Peut-être que j'avais peur qu'il revienne à la charge plus tard? S'il m'avait posé la question, c'était qu'il voulait vraiment savoir, peu importe sa raison, alors il n'abandonnerait pas aussi facilement. Peut-être que je voulais tout simplement en être débarassée une bonne fois pour toute...?

J'ai pris une profonde inspiration et j'ai tout déballé.
-La première nuit, je me suis réveillée à moitié nue, votre frère couché sur moi en train de me tripoter!
-La provocation ne fonctionne pas avec moi, surtout venant de toi.
-Ce n'est pas de la provocation!
-Pourquoi il aurait fait ça?
-Je ne sais pas! Je ne lui ai pas demandé! J'étais occupée à me défendre!
-Te défendre contre quoi?
-Me défendre contre l'homme qui m'avait déshabillée et tripotée durant mon sommeil!
-...
-J'aurais dû le laisser faire peut-être?!
-...
-...
Encore ce silence si pesant. D'accord, je vais continuer...

J'ai enchaîné avec les leçons de danse et les coups de fouet sur mes pieds, qui ont fini fendus jusqu'au sang. Il n'a pas commenté. Juste un haussement de sourcil, comme s'il doutait de la véracité de mes paroles.

J'ai continué avec les leçons d'équitation et les commentaires déplacés de son frère. Dieu merci, il ne m'a pas demandé de précision.

Ensuite, ma deuxième leçon préférée: la broderie/tricot. J'ai parlé de l'aiguille à tricot dans la main, des menaces, du petit doigt disloqué. Encore ce haussement de sourcil...

Puis, vint ma partie préférée: les leçons de diction. Je me suis contentée de dire que c'était un livre très déplacé (jamais je n'aurais pu dire quel était le sujet exact, beaucoup trop gênant). J'ai parlé de la belle-soeur, de son départ. Puis l'arrivée de son frère, ses commentaires encore déplacés, sa main rendue à moitié sous ma robe... Plus mon récit avançait, moins j'osais le regarder. Quand je suis arrivée au moment où son frère m'avait demandé d'enlever ma robe, sinon il aurait demandé à des serviteurs de le faire à ma place, j'osais à peine lui jeter de minuscules coups d'oeil, tellement j'étais mal à l'aise. Lui n'avait pas arrêté un instant de me fixer, toujours en silence.

Alors j'ai continué: la lecture avec le frère qui me reluquait, la belle-soeur qui est revenue et qui s'est mise à discuter avec son mari comme si de rien était...

La suite, il en connaissait une partie. Il était arrivé et j'avais osé lui répliquer. Ça n'avait pas plu à la belle-soeur, qui m'avait forcée à manger un pain au savon et... la cerise sur le sundae, ses menaces on ne peut plus claires. Je m'en souvenais par coeur: Si tu ne le satisfais pas d'une quelconque façon, je vais te revendre à des marins pas recommendables, cinq ou six, qui auront pour seule mission de faire souffrir le plus longtemps possible.

Le lendemain matin à l'aurore, la belle-soeur était venue me réveiller. Elle m'avait mis un sac (de vêtements?), m'avait emmenée jusqu'au bateau et m'avait enfermée à clé dans la cale. And the rest was history.

Voilà. Mon histoire était terminée. Ça avait été beaucoup plus facile que ce que je croyais, probablement à cause que je n'avais reçu aucune interruption. Je ne sais pas si je pouvais dire que le pire était derrière moi, parce que je me sentais toujours profondément mal à l'aise. Je n'éprouvais aucun sentiment de libération comme ce genre de confidence en apporte parfois.

Je me sentais d'autant plus mal à l'aise qu'il ne disait rien. Moi j'attendais, que ce soit un commentaire ou une question mais il ne se passait rien. Je viens de vous raconter un des épisodes les plus difficiles de ma vie et vous ne me dites rien?
-Vous voulez savoir autre chose?
-...C'est tout?
-Oui, c'est tout.
(Que voulez-vous qu'il y ait d'autre? C'est vrai, j'ai oublié l'épisode où votre frère a mis sa langue dans ma bouche, mais voulez-vous vraiment savoir ça?)

J'aurais tant aimé avoir son opinion, que ce soit en bien ou en mal, mais je n'ai rien eu du tout. Sans un mot, il s'est dirigé vers son armoire à alcool et il l'a vidée. Et quand je dis «vidée», c'est dans le sens de complètement vidée. Ses mains étaient tellement pleines qu'il ne pouvait pas ouvrir la porte. Je m'apprêtais à le faire pour lui quand il a décidé de la défoncer d'un coup de pied. Euh...Est-ce qu'il est fâché?

Je l'ai suivi discrètement, trop curieuse que j'étais. Je l'ai vu donner des ordres à Jacques, qui semblait plutôt perplexe. Après, il s'est rendu jusqu'à la proue et il a jeté ses bouteilles une à une par-dessus bord. What the hell...? Mais qu'est-ce qu'il fait et pourquoi? Il doit forcément y avoir un rapport avec ce que je lui ai dit. Il ne peut pas avoir soudainement décidé de se débarrasser de son alcool, alors qu'il carbure à ça. Mais quel lien et surtout, pourquoi y en a-t-il un? Qu'est-ce que je lui ai dit qui lui ait causé un si grand choc?

Pendant qu'il continuait à jeter ses bouteilles, des marins sont arrivés avec des tonneaux et des caisses, qui ont aussi été jetés par-dessus bord. Est-ce qu'ils étaient aussi remplis d'alcool? Si oui, c'était vraiment radical comme solution.

Quand il a eu fini, je l'ai vu parler à d'autres marins, avant de s'en retourner vers sa cabine. Je n'avais pas trop envie de provoquer un face-à-face alors je suis retournée l'attendre là-bas. J'espérais encore à ce moment-là recevoir une opinion, mais tout ce que j'ai eu ce fut un «ramasse tes affaires, des marins vont venir te chercher pour t'emmener dans une nouvelle cabine». Oh...

Ce n'étaitpas que j'étais déçue, mais je l'étais un peu. J'étais bien entendu heureuse d'avoir de nouveau un espace à moi, mais je commençais à m'habituer à la cabine de Lemleck et comme les choses semblaient reparties sur de nouvelles bases entre nous, ça ne me dérangeait plus autant d'y rester. Ce qui me dérangeait, c'était cette impression d'avoir été chassée. comme s'il ne voulait plus m'avoir sous les yeux. Est-ce que j'ai fait quelque chose de mal? Ou dit quelque chose de mal? Peut-être pense-t-il que je lui ai menti?

Je n'ai pas pu lui demander le pourquoi du comment que moi et mes maigres possessions (quelques vêtements) étions emmenés dans notre nouvelle demeure, une petite cabine à proximité de celle du capitaine. Comme la dernière fois, les marins s'étaient fendus en quatre pour que ça ait l'air le plus accueillant possible. J'étais très touchée par leur gentillesse, mais pas assez pour chasser mon malaise. Pourquoi Lemleck avait-il jeté/fait jeter tout l'alcool qu'il y avait à bord et pourquoi m'avait-il chassée...?

2 bisou:

Quentin a dit…

Motivée! XD

il a encore plein de surprise pour toi dans son sac, notre Lemleck. T'inquiete! :P

Lyra a dit…

Oui, je l'étais. J'ai commencée le matin à ma job et j'ai fini le soir à la maison. Je cantais devant l'ordi depuis une bonne heure, mais je voulais vraiment finir.

J'ai bien hâte de voir les surprises qu'il lui réserve. Je m'attends à beaucoup de perturbation... ^^