lundi 23 août 2010

Culpabilité et envie de meurtre

Quand elle nous a vus, la jeune fille a couru dans la maison. Un homme en est ressorti… suivi de Mill. WTF? Comment ça se fait qu’il est réveillé? Dès qu’il m’a vue, il a couru vers moi et il m’a huggée. J’aurai voulu être heureuse de le revoir, mais nos retrouvailles me laissaient une sensation très douce-amère sur le cœur. Il ne devrait pas être réveillé. Il devait rester endormi jusqu’à ce que nous lui donnions l’eau magique.

Mill m’a dit qu’ils étaient réveillés depuis quelques semaines. Ruby avait fini par se lasser et elle était partie nous chercher. Il n’avait jamais vu de petite fille aux cheveux bruns. Depuis… des semaines? Alors nous aurions pu tout simplement attendre et nos amis se seraient réveillés d’eux-mêmes? Uvi est mort pour rien… par ma faute.

Je me sentais atrocement coupable, mais aussi très en colère. Cette petite fille s’était foutue de nous. Si elle ne s’était pas pointée ici, Uvi ne serait jamais mort. Il est mort à cause d’elle. Je vais la tuer… Non. Je vais commencer par la tabasser à mort et après je vais la tuer. Mill n’était pas très d’accord avec mes plans de meurtre. Si seulement tu connaissais toute la situation… Même si tu la connaissais, je crois que tu essaierais de me faire changer d’avis. Ne perds pas ton temps. Je vais la tuer. Tant pis pour elle si c’est une enfant. En général, je crois que tuer des enfants est très mal, mais cette fois-ci je vais faire une exception.

Nous sommes tous entrés dans la maison pour rejoindre la famille de demi-elfes. Il y avait un humain assis à leur table. Et moi qui voulais minimiser mes contacts avec les humains… Une fois tout le monde assis, il y a eu un gros malaise dans l’air. Je sentais que c’était à moi de parler, mais par où commencer? Mill s’étonnait que je voyage avec des humains. Je lui ai répondu qu’ils n’étaient pas si pires que ça : Henryk était cool, William super gentil, Eri aussi et James… il était juste louche. Je n’avais pas trop envie de raconter tout ce qui s’était passé devant tout le monde, alors je suis sortie avec Mill.

Je lui ai résumé rapidement ce qui s’était passé : la petite fille, l’eau magique, notre séjour chez les poissons, la commotion d’Uvi dans Hopesor, les vampires, puis notre présence au beau milieu du champ de bataille. Je n’ai pas mentionné ma séance de torture. Je n’ai pas non plus été capable de dire carrément qu’Uvi était mort. Je l’ai seulement sous-entendu et heureusement, Mill l’a compris. Il m’a serrée très fort contre lui et il s’est mis à pleurer. J’ai répondu à son câlin, mais je me suis retenue de toutes mes forces pour ne pas pleurer.

Mill m’a dit que je pouvais pleurer. Non merci. J’ai eu une semaine pour pleurer. À quoi ça me servirait de continuer? Ça ne ramènerait pas Uvi et ça ne changerait rien au fait que j’ai causé sa mort. Mill avait beau dire que c’était Uvi qui avait décidé de me suivre, si je n’avais pas insisté autant, il serait resté auprès de mes amis et il serait toujours en vie. Je suis donc aussi responsable que cette petite salope qui nous a embarqués dans cette histoires de fous, que ce crétin de Beloss qui a donné une commotion à Uvi et que ce général cinglé qui l’a fait torturer. Sorry about that. I have some little (big) anger problems right now. C’est une bonne chose que Beloss soit mort, ça m’évite d’avoir à le tuer. Si je retrouve la fillette, je jure de l’envoyer dans l’autre monde. Et si un jour je deviens assez puissante, je promets sur la tête d’Uvi de retourner à la citadelle et de tout détruire.

J’aurais bien aimé que Mill m’éclaire sur les raisons qui avaient poussé Uvi à rejeter ma déclaration, mais il n’en savait pas plus que moi. Peut-être que Ruby saurait, mais pour lui demander, il faudrait d’abord la retrouver. C’était aussi l’intention de Mill, alors nous sommes retournés vers la maison pour chercher ses affaires. L’humain blond est sorti au moment où nous allions rentrer. Il s’est présenté : Albert-quelque chose-Cirqui. C’est ça. Enchantée et au revoir.

L’humain leur avait fait une offre, qu’Henryk m’a résumée. Je ne suis pas certaine d’avoir bien compris, en tout cas j’espère ne pas avoir bien compris. Selon un oracle, nous serions des élus qui devions trouver des socles… ou des pierres… ou les deux? Nous devrions aussi empêcher un homme appelé Marayel, qui se prenait pour l’avatar d’un dieu, de récupérer ces socles… pierres… whatever. J’ai tellement ri quand j’ai entendu ça. J’ai dû passer pour une cinglée aux yeux de tout le monde, mais tant pis. Alors j’ai été élue pour trouver des cailloux? C’est tellement l’histoire la plus ridicule que j’ai jamais entendue. Moi, une élue? À part causer la mort de ceux que j’aime, je ne suis pas bonne à grand-chose alors être élue pour sauver le monde d’un illuminé? I don’t think so.

Ça c’était la partie drôle. La partie la moins drôle ça a été quand ils ont dit que ce Marayel était responsable de tout ce qui c’était passé. Information intéressante, mais qu’est-ce qui nous prouve que c’est vrai? Et qu’est-ce qui nous prouve que ce Cirqui a dit la vérité et que ce n’est pas plutôt lui qui a causé tout ça? Ce Cirqui avait aussi dit que si nous acceptions son offre, il nous fournirait en tout ce que nous aurions besoin au cours de l’aventure et qu’une fois que tout serait fini, il nous donnerait ce que nous voulions. Ce que je voulais, je l’ai perdu à tout jamais. Et puis, est-ce que j’ai vraiment envie de me mêler de problèmes d’humains?

Les autres emblaient d’avis que si ce que l’oracle avait dit était vrai, ils allaient aider. Autrefois, j’aurais sans doute dit oui aussi, mais aujourd’hui je me fichais de tout. Je voulais juste m’en aller et tenter d’oublier tout ce qui c’était passé. Eri n’était pas d’accord pour que James y aille. Elle a dit que s’il venait, elle allait s’en aller. J’ai dit que c’était moi qui allais partir, mais personne ne m’a entendue. Tout le monde a fini par sortir et je me suis retrouvée seule le temps que Mill aille remercier les demi-elfes de leur hospitalité.

Henryk est rentré et quand je lui ai dit que je ne voulais pas les accompagner, il m’a répondu que c’était sans doute la meilleure solution. Ensuite il s’est excusé… de ne pas nous avoir assez protégés Uvi et moi. Euh…?? Pourquoi tu t’excuses? Ce n’est pas toi qui as donné une commotion à Uvi et ce n’est pas toi qui l’as torturé. Tu n’es responsable de rien.

Il m’a ensuite dit adieu et souhaité bonne chance dans ma nouvelle vie. Nouvelle vie? Est-ce que je peux vraiment appeler ce que je vais avoir une vie? James est aussi venu s’excuser, de sa maladresse. Ses excuses étaient plutôt maladroites, mais au moins il a fait des efforts. Je le trouverai toujours louche, mais je lui pardonne… à peu près. You know what they say : forgive but not forget.

Mill est revenu et nous sommes sortis main dans la main. J’ai pris sa main un peu à reculons. La dernière personne avec qui j’avais fait ça c’était Uvi et en ce moment, tout ce qui me rappelle Uvi fait mal. Maybe one day it will be less painful, but right now it hurts like hell. J’ai rapidement dit au revoir à mes anciens compagnons. Inutile de m’attarder, je ne les reverrais plus jamais. Eri m’a promis (si tout ce qui c’était dit était vrai) qu’elle découperait en morceaux le type qui était responsable de tout. Mill n’était pas très d’accord, mais moi je pensais que c’était une excellente chose. Puisse-t-il mourir dans d’atroces souffrances qui dureront longtemps (je prie pour que ça arrive) et je serai très heureuse.

J’ai tourné le dos à tout le monde et Mill et moi nous sommes dirigés vers la forêt, à la recherche de Ruby. I hope no one will get in our way, because I’m really not in the mood to be delayed.

mercredi 18 août 2010

Le bazooka pour les nuls

Une petite (grosse) niaiserie en attendant mon post. ^^


mardi 3 août 2010

I've lost him forever... and I feel like it's my fault

Have you ever had the feeling that your life was over? That nothing around you mattered because you lost the most important thing to you? That the only things you could feel were devastation and emptiness because what, or rather who, made you smile and made your heart beat is gone, forever? Moi c’est comme ça que je me sens en ce moment, parce que j’ai perdu Uvi… pour toujours.

Les choses allaient plutôt bien. J’avais parlé à Lena de mon envie de tuer Beloss, parce que j’étais royalement écœurée de toutes les conneries qu’il faisait et surtout de leurs conséquences. Elle m’a proposé de dire à Beloss qu’elle le mettrait en-dehors du groupe à sa prochaine connerie et moi je lui ai promis de ne pas essayé de tuer Beloss tant que nous voyagerions tous ensemble.

Uvi n’allait toujours pas bien, alors je m’en occupais du mieux que je pouvais. J’adorais le dorloter et lui se laissait faire. Que demander de plus? J’essayais de ne pas y mettre trop d’espoir, mais c’était si difficile. J’étais si heureuse de l’avoir près de moi…

Dans la nuit du 12 au 13 septembre, je me suis arrangée pour faire mon tour de garde avec Henryk. J’ai «oublié» de réveiller Uvi et j’ai pu parler avec Henryk sans que personne ne nous dérange. Je lui posé tout un tas de questions du genre s’il avait déjà tué, de sang froid, si c’était facile et finalement, s’il pouvait me donner des suggestions. Il m’a suggéré les objets tranchants, la noyade, les accidents. Quand je lui ai avoué que je voulais m’en prendre à quelqu’un du groupe, il m’a suggéré de prendre mon mal en patience et il m’a proposé son aide le moment venu. Je vais m’en souvenir, parce que ça risque d’être difficile à faire toute seule. Je crois que la discussion a perturbé Henryk, parce qu’il m’a laissé seule pour aller s’entraîner.

Le matin, nous avons tous été réveillés par des gros bruits. C’était des boulets de canon. Nous étions pris entre une armée d’elfes/arcadiens et une armée d’humains qui s’apprêtaient à se taper dessus. Ce fut le début de la fin.

Uvi et moi sommes embarqués sur Béarchand avec Henryk et nous sommes partis, pendant que les autres discutaient encore. Il n’y avait aucun moyen pour nous d’éviter tous ces soldats, alors je me suis accrochée à Uvi et j’ai prié pour que nous nous en sortions. Nous avons perdu Henryk de vue, mais nous avons réussi à nous accrocher au cheval. Une éternité plus tard, quand tout fut fini, nous avons retrouvé Henryk, mais des groupes de soldats sont venus vers nous et nous avons dû nous enfuir. Nous avons malheureusement été rattrapés par des cavaliers et des soldats à pied. En dernier recours, j’ai essayé de lancer un flare, mais ça n’a servi à rien à part me faire traiter de salope. Ils nous ont fait descendre de cheval et menottés. J’ai senti d’étranges picotements dans mes bras au moment où les menottes se sont refermées. I got a bad feeling about this.

Nous avons fini par tous nous retrouver (tout le monde était menotté) devant une tente. Un demi-drow qui avait l’air d’être le chef est sorti. Étienne nous a chuchoté de faire comme si on ne le connaissait pas. Le demi-drow a regardé Étienne et l’a appelé Léac. Léac? WTF? Il a demandé à Lena et William s’ils connaissaient Léac. Il a ensuite dit qu’il allait s’occuper de William pour vérifier s’il était arcadien. Avec l’air sadique qu’il avait sur le visage, je crois qu’il voulait le torturer. Oh mon dieu… Nous allons être torturés et ensuite tués. Quand j’ai vu les trois prisonniers se faire exécuter devant nous, j’ai quand même été contente de ne pas en faire partie. Si j’avais su ce qui allait arriver, je crois que j’aurais supplié pour en faire partie.

Nous avons été attachés sans ménagement derrière des chariots et nous sommes partis. Il ne servait à rien de leur demander de s’arrêter quand nous étions épuisés. Nous aurions pu ne pas être là et les choses n’auraient pas été différentes. À environ minuit, nous sommes arrivés à une citadelle. Beloss a été attaché dans la cour et nous avons été enfermés dans des cachots sombres et puants. Ils nous ont enlevé les chaînes, mais ont laissé les menottes.

J’ai entendu les cris de douleur de mes compagnons sans voir ce qui leur arrivait. Mais je les ai bien vus quand ils sont passés devant notre cellule pour sortir de la prison : ils ne portaient plus leur chandail et leur dos saignait. Ça ne me laissait pas trop d’espoir pour notre sort. Nous étions deux elfes dans une citadelle d’humains complètement cinglés qui détestaient les elfes. Plus j’y pensais et plus je voyais la fin arriver bientôt.

Quand le général est arrivé, j’ai su ce qui était arrivé à James, Eri et Henryk en le voyant arriver sur William et Étienne. Un instrument a été rentré dans leur dos et ils ont hurlé. Quand ça a été le tour d’Étienne, il y a eu une explosion (comme une boule de feu) et j’ai pu voir des ailes dans le dos d’Étienne. Elles étaient rose pâle, comme ses cheveux ^^. William a pris le même chemin que les trois autres et avant de me retrouver seule avec mes trois derniers compagnons, le général a dit que demain nous allions être mis dans une autre pièce, parce qu’il ne fallait pas mélanger les morpions et les poulets. Il vient de nous traiter de morpions? Si je n’avais pas été certaine de subir des conséquences négatives, je lui aurais répliqué.

Après son départ, je me suis assise par terre en position fœtale et je me suis balancée d’en avant à en arrière. J’étais morte de peur. Je vais mourir… Je vais mourir… Uvi s’est assis à côté de moi pour me réconforter. Je voyais bien que ça lui demandait beaucoup d’efforts, mais il le faisait quand même. Je me suis accotée sur lui tout en continuant de trembler. J’ai tellement peur Uvi… Et entendre Étienne dire à Lena qu’elle allait être torturée avant de mourir ne m’a pas aidée du tout à être rassurée.

Durant l’attente, j’ai pu en apprendre un peu plus sur Étienne. Son vrai nom était bien Léac et il était un espion. Son nom complet : Léac the Wise. Pfft! Étienne, sage? J’ai trouvé ça tellement drôle que je lui ai demandé si je devais maintenant l’appeler Étienne le sage. «Monseigneur» lui suffisait. Alors ce sera «Monseigneur Étienne le sage». Il a finalement avoué pourquoi il avait assommé Uvi trois fois : le seul moyen de sortir était de sortir ses ailes et Uvi ne devait pas les voir. Je me sentais mal de ce que j’avais pensé de lui et de comment j’avais agi envers lui alors je me suis excusée d’avoir pensé qu’il était un trou-de-cul.

Il nous a conseillé de transmettre nos dernières volontés maintenant, parce que ce n’était pas tout le monde qui allait s’en sortir. Étienne a demandé à Lena de s’occuper de sa mère et moi j’ai demandé qu’on dise à mes parents que je les aimais. Uvi m’a dit que j’allais être là pour leur dire. Toi aussi! «Bien sûr», qu’il m’a répondu. Je ne sais pas s’il savait au fond de lui à ce moment-là qu’il allait mourir et qu’il m’a dit ça juste pour me rassurer. C’était bien son genre : à toujours s’occuper de moi avant de s’occuper de lui-même. No wonder I fell in love with him.

Dans la matinée du 14, nous avons commencé à entendre des cris de douleur très intenses qui venaient de loin. Ça a duré des heures. Quand des soldats sont venus nous chercher, nous les entendions encore. Au moins les soldats m’ont laissé aider Uvi à marcher. Nous avons descendu des marches et c’est seulement là que nous avons cessé d’entendre les cris. Étienne et Lena sont allés dans une pièce et Uvi et moi dans une autre. Nous étions dans une salle de torture. Il y avait pleins de trucs… que j’aurais aimé ne jamais voir. Je crois qu’Uvi était aussi découragé que moi et il devait penser la même chose : nous allons mourir dans d’atroces souffrances.

Ça n’aurait pas été une bonne idée de résister alors je me suis laissée attacher sur la table et Uvi a été attaché au mur. Le bourreau a découpé nos vêtements. Muuu… Je suis toute nue devant quelqu’un. Le bourreau m’a présenté ses instruments. Il avait donné des noms à chacun d’eux. Il s’est occupé de moi et un grand homme avec les lèvres cousues ensemble (ew) s’est occupé de torturer Uvi. C’est ce qui m’a fait le plus mal : entendre ses cris de douleur entre les miens. S’il vous plaît, laissez-le tranquille.

Je n’ai jamais autant souffert de toute ma vie : membres étirés, lambeaux de chair arrachés, douleur atroce à la poitrine, piquants enfoncés dans le dos, piquants enfoncés dans le dos mais chauffés, plat de braise chaude sous les pieds, trempette dans de l’eau salée… J’en oublie? Ça a été sans contredit l’expérience la plus horrible de ma vie, mais j’aurais accepté le double si ça avait pu éviter des souffrances à Uvi. Le pire, c’est que le général a eu le culot de me dire que s’il avait su avant qu’Uvi avait une commotion cérébrale, il m’aurait posé les questions qu’il lui posait à lui. Mon œil! Vous l’auriez torturé quand même!

J’aurais voulu être plus résistante, mais la douleur a été trop pour moi : j’ai dit au général ce qu’il voulait savoir. J’ai seulement trouvé la force de ne pas parler de mes parents ou de ce que Willington m’avait dit. Comme il voulait être certain de mes réponses, j’ai encore plus souffert et Uvi aussi, parce que j’ai dit que je voulais qu’il garde ses morceaux. Ils lui ont dessiné dans le dos avec une lame pour s’assurer de ma sincérité. Si je n’avais rien dit, est-ce que ça aurait été pire? Je ne sais pas. Mais ça n’aurait rien changé au résultat.

Le général a demandé au bourreau de nous faire tremper dans de l’eau salée. Il allait revenir plus tard. Après cette énième torture, le bourreau nous a suspendus côte-à-côté, nos pieds touchant à peine le sol, et il nous a laissé seuls. Il n’y avait plus de doute dans mon esprit à ce moment-là : j’allais mourir. Ce n’était qu’une question de temps. Mais je ne voulais pas que ça arrive sans que j’aie dit une dernière fois à Uvi que je l’aimais. C’est ce que j’ai fait et pour ma plus grande surprise, il m’a répondu que lui aussi. Il ne savait probablement plus ce qu’il disait, mais ça m’a quand même fait plaisir. Je pouvais maintenant mourir heureuse.

Un peu plus tard, quelqu’un est entré dans la pièce. Je pensais que nous allions encore être torturés ou comble de chance achevés rapidement, mais la femme était là pour nous sauver. Elle nous a détachés et elle s’est occupée de nous, nous donnant potions et vêtements. Elle ne pouvait malheureusement rien faire pour le bras d’Uvi qui avait été broyé sous la masse et malgré sa potion, il n’allait toujours pas bien. Please, hold on…

Nous avons retrouvé Étienne et Lena dans l’autre salle de torture. Nous sommes allés récupérer nos sacs et nos armes dans la pièce indiquée par la femme et nous sommes montés jusque dans une tour. La carcasse de Beloss était dans la cour. J’ai été malade. Je sais bien que j’avais souhaité (très) qu’il meure, mais pas d’une façon aussi horrible.

Étienne voulait que les choses soient claires : si quelqu’un restait derrière, ça serait lui et Uvi. Ben là, non… Il m’a demandé si je croyais qu’Uvi serait heureux que je meure avec lui. Non, mais… Uvi a dit qu’il préférait ne pas rester dans cet état. J’ai donc dit que j’étais d’accord, mais sans être certaine que je pourrais respecter ma parole. Lena m’a prise dans ses bras pour s’envoler et Étienne s’est occupé d’Uvi.

Nous avons volé jusqu’à un endroit où la plaine descendait abruptement et je ne sais pas trop ce qui s’est passé, mais Étienne est tombé du haut des airs et avec lui, Uvi. Dès que j’ai touché le sol, je me suis précipitée vers mon ami, qui n’allait pas bien du tout. Étienne m’a demandé de lui ouvrir le bras (???) avec ma dague, ce que j’ai fait et je suis tout de suite retournée près d’Uvi. Je ne voulais pas pleurer, mais je n’ai pas pu m’empêcher de le faire. Je sentais qu’il allait me quitter.

Il m’a fait promettre de retourner près de nos amis et de leur dire de sa part qu’il était désolé. Il m’a rappelé que nous n’avions pas eu notre discussion. Ça n’a aucune importance. J’abandonnerais toutes les discussions du monde pour que tu restes à mes côtés. Quand il m’a demandé de me pencher vers lui, je pensais que c’était parce qu’il n’avait plus de force que pour chuchoter, mais il ne m’a pas parlé, il m’a embrassée. Alors… Même s’il ne pouvait pas être avec moi pour «X» raison, il m’aimait vraiment? Autant que moi je l’aimais?

Après, il m’a suggéré d’écrire une chanson sur tout ce que nous avions vécu. Si ça peut te faire plaisir, mais je vais d’abord devoir écrire des paroles pour l’air que tu m’as écrit. Uvi ne m’a pas répondu. Son regard était vide et il ne respirait plus. J’ai eu beau le secouer, hurler son nom et pleurer toutes les larmes de mon corps, il m’avait définitivement quittée.

Tout le monde réuni, Henryk a essayé de m’arracher au corps de mon amour, mais nous sommes finalement partis en emmenant les corps d’Uvi et d’Étienne, qui était mort dans les bras de Lena, avec nous. Quand nous avons fait une pause, je me suis mise à creuser la tombe d’Uvi. Ça m’a pris une éternité, mais je ne voulais pas que qui que ce soit m’aide. Si quelqu’un avait osé me proposer son aide, je crois que je l’aurais tué.

J’ai enterré Uvi et je suis restée assise en petite boule sur sa tombe. Il aurait mérité tellement plus que cette tombe de fortune, mais je ne pouvais pas faire mieux. Je pensais d’abord garder seulement son luth, mais finalement, j’ai tout gardé. J’ai été incapable de me défaire de quoi que ce soit qui me le rappelait.

J’ai perdu tellement de temps. Si j’avais eu le courage de lui dire bien avant que je l’aimais, les choses auraient peut-être été différentes. Et si je m’étais mieux occupée de lui? Il était malade. J’aurais dû en prendre plus soin, j’aurais dû insister pour que nous nous reposions et qu’il puisse reprendre des forces. Je n’aurais jamais dû lui demander de m’accompagner. Je l’aimais, j’avais peur et je ne voulais pas partir sans lui. Si je m’étais montrée forte, Uvi serait resté avec nos amis et il serait encore en vie. Je l’aimais et je l’ai conduit tout droit à sa mort. Tout est de ma faute…

William m’a offert ses sympathies, mais je l’ai repoussé. Je n’avais pas envie de parler. Qu’est-ce que ça changerait de toute façon? Uvi était mort et je ne pouvais pas le ramener. James m’a aussi offert ses sympathies. Je ne voulais pas qu’il s’éternise, alors je l’ai rapidement remercié, espérant qu’il s’en aille. C’est ce qu’il a fait, mais pas avant de m’avoir souhaité «bonne soirée». Bonne soirée? Bonne soirée?! BONNE SOIRÉE?! Tu te fous de ma gueule, tabarnak?! Uvi est mort!! Comment veux-tu que je passe une bonne soirée?! Je vais te tuer mon sale!! J’ai commencé à lui courir après en lui donnant des coups de bâton. Je me fiche que tu n’ais pas de talent pour ça! Je vais te buter!!

Sans l’intervention d’Henryk, je crois que j’aurais continué à lui taper dessus jusqu’à ce qu’il soit mort. Il m’a enlevé mon bâton et quand je lui ai expliqué la raison de mon comportement, il a paru comprendre. Il m’a proposé de lui taper dessus à la place. Mais ça ne serait pas pareil… Je pourrais penser à un moyen de lui enlever son autre bras…? Encore plus simple : avec tout ce que j’avais vu dans la citadelle, je pourrais mettre certaines idées en pratique sur lui…? William n’étais pas très d’accord. Moi je me fichais bien que ça soit mal de penser à faire du mal aux gens, ça me faisait du bien de le faire.

Nous avons voyagé durant une semaine avant d’arriver à destination. J’ai passé mes nuits à pleurer en silence, la tête cachée dans la couverture d’Uvi. Mes journées je les ai passées à m’entraîner au luth et à utiliser les couteaux à lancer d’Uvi. Mais ça ne me suffisait pas. Je devais trouver une arme plus grosse. Peut-être que si j’apprenais à me battre avec deux épées? Non, trop rapproché. Une lance alors? La portée est grande et je pourrai sans doute faire plus de dégâts. Tout pour me contenter.

Le reste du temps, j’ai pensé. D’abord à tout le temps que j’avais perdu, avec Uvi, mais aussi avec Étienne. Toutes les fois où je l’avais ignoré et toutes les fois où j’avais repoussé ses tentatives de rapprochement. C’était quelqu’un de vraiment bien et je l’ai traité comme de la merde. A-t-il compris à quel point je regrettais tout avant la fin? Je ne sais pas. Je ne lui ai pas dit et maintenant je ne pourrai plus jamais le faire. Et mon cher Uvi… J’aurais dû lui dire chaque jour, à chaque instant depuis que je m’en étais rendu compte : je t’aime. J’ai perdu tellement de temps et maintenant il est trop tard.

J’ai eu l’impression que quelque chose en moi se brisait durant le voyage du retour, comme si je laissais derrière une partie de moi que je perdais à jamais. Je me sentais démolie, détruite, mon cœur arraché et déchiqueté en mille morceaux. Une partie de cette douleur revenait au général demi-drow. Pour tout ce qu’Uvi avait subi, si je le revoyais un jour, je jure de le faire crever dans des souffrances encore plus grandes que ce que mon amour avait endurées.

J’étais aussi en colère contre moi-même. Je me sentais comme si j’avais beaucoup de choses à me reprocher. Si j’avais été plus forte, je n’aurais pas dépendu autant d’Uvi. Je ne lui aurais donc pas demandé de m’accompagner et il serait toujours en vie. Je sentais sur mes épaules le poids de sa mort de plus en plus lourd. Et si j’avais été plus forte, j’aurais pu mieux faire face à tout ça et j’aurais pu mieux me défendre. À quoi ça m’aura servi d’être gentille et pacifique? Je n’ai pas pu sauver l’homme que j’aimais et j’ai souffert mille maux, autant mentalement que physiquement. La survie appartient à ceux qui savent se défendre. Tuer ou être tué. Autrefois, cette pensée m’aurait fait horreur. Aujourd’hui, elle était très facile à accepter.

J’étais en colère contre absolument tout et tout le monde (à part William, il est trop gentil). Et dire qu’Étienne m’avait dit de garder espoir. Quel espoir? Je l’ai définitivement perdu. Étienne avait aussi dit que tous les humains n’étaient pas mauvais. Right. Après ce que je viens de vivre, je ne reparlerai plus à un humain à moins d’y être obligée. J’avais aussi perdu toute envie : envie de croire (en qui et en quoi que ce soit) et de me rapprocher et surtout envie d’aimer. La première fois, j’avais eu le cœur brisé et la deuxième fois… j’avais eu le cœur brisé. Plus jamais.

Quand nous sommes arrivés en vue de la ferme où mes amis se trouvaient, je n’étais plus la même depuis un bon moment. Je vais les réveiller et leur donner le message d’Uvi. Je prendrai bien sûr le temps de leur raconter ce qui s’est passé et je leur poserai quelques questions dont j’ai besoin d’obtenir des réponses. Mais après… Je n’ai pas envie d’avoir aussi leur mort sur ma conscience. Je crois que je vais retourner chez moi, et ne plus jamais en partir.

Mes pensées ont failli me faire manquer le cheval blanc qui broutait dans l’herbe près de la ferme et cette fille qui avait l’air de cueillir des fleurs. Je ne sais pas ce qui se passe, mais si je rencontre quelqu’un le moindrement hostile, je jure que je vais le tuer sans poser de question.